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Smallisblog

"Mon nom d'artiste est Mahn Kloix, je vis et travaille à Marseille. Touché par la résistance des Indignés, j'ai initié un projet de street art visant à leur rendre hommage. Leurs portraits réalisés, me voilà parti, avec Yuvany Gnep qui m'aide à réaliser photos, vidéos et interviews, pour Tunis, Madrid, New York, Oakland et Athènes afin d'afficher sur les murs et rencontrer ceux qui résistent encore."




NEW-YORK

Premières impressions depuis Lower East Side à Manhattan

Écrit par Mahn Kloix lundi 4 août 2014



Nous voilà arrivés à New York ! Je dis « nous » car je serai tout au long de ce voyage accompagné de Yuvany, traductrice ayant une formation d'anthropologue et qui a auparavant travaillé sur des mouvements de mobilisations sociales, en Chine notamment. Elle va m'aider à réaliser le documentaire sur le projet en prenant photos et vidéos, en préparant les interviews des personnes auxquelles ce projet rend hommage, et enfin en écrivant des posts de ce blog et certaines traductions.

Nous nous sommes donc envolés vendredi soir pour note première destination, New York. Premier avant goût du voyage, les contrôles aux aéroports de Marignane et de New York, que nous redoutions plus longs qu'à la normale en raison des récents renforcements des mesures de sécurité mis en place sur les vols à destination des États-Unis. Au final, un simple court questionnaire oral sur le propos de notre voyage et le contenu de nos bagages à Marignane, et... rien à l'arrivée à JFK, l'aéroport de New York. Première bonne surprise donc, puisqu'en quelques minutes nous sommes hors de l'aéroport. Il est environ 23 heures heure locale, 5h du matin heure française. Nous sommes épuisés mais heureux d'être arrivés.

Nous filons vers Manhattan : nous avons loué un petit appartement dans le quartier animé de Lower East Side, à l'extrémité sud-est de l'île. Le bus nous dépose à Grand Central, au pied de l'Empire State Building : entrée rapide et presque surréaliste dans le vif du sujet. Les premières impressions sont des plus agréables, d'autant plus que le décor et l'accent des gens nous plonge dans une ambiance presque familière, celle des nombreux films américains qui font finalement partie de notre quotidien en France.





Sur le chemin, en tirant nos valises sur le bitume abîmé des rues de la ville, nous croisons des petits groupes de jeunes, joyeux et souvent éméchés. Nos réalisons que notre nouveau quartier, que nous avions choisi pour sa centralité et l'accès facile aux différentes zones de New York, est très branché. Nous découvrons ensuite que des couches plus populaires fraîchement immigrées sont aussi largement présentes. Elles témoignent de la fonction d'accueil de différentes vagues migratoires qui était celle de ce quartier. des fondations de la ville jusqu'à très récemment. En résumé, nous voilà donc dans un concentré de New York, pas loin de Little Italy, ChinaTown et du Financial Center qui nous intéresse plus particulièrement pour ce projet, le mouvement Occupy Wall Street étant la principal raison de notre venue ici.



L'heure des repérages à Wall street et Brooklyn

Écrit par Mahn Kloix mardi 5 août 2014



Deux journées de repérages se sont déjà écoulées. Deux journées et plus de 30 km parcourus à pied pour nous repérer dans la ville, et pour repérer les endroits où Mahn pourra réaliser les collages de ses affiches. Différents critères guident le choix de ces lieux. Ils doivent d'abord correspondre aux endroits où les protestations Occupy Wall street se sont déroulées.

Ils doivent aussi pouvoir être vus par un grand nombre de personnes. Enfin, ils faut qu'ils se trouvent dans des zones ayant une certaine résonnance dans l'univers artistique engagé local, pour que le message que porte ce projet ait plus de chance d'être relayé sur place.



Première zone de collage potentiel : Wall Street et le quartier du Financial District. L'endroit le plus évident , mais peut-être aussi le plus "risqué". Nous ne savons pas si nous pourrons arriver à coller les affiches près de ce lieu emblématique, et si nous y arrivons, nous ne savons pas si les affiches pourront être visibles longtemps. Les rues de ce quartier sont quadrillées par de nombreuses caméras de surveillance, accrochées aux immeubles vertigineux, et par la présence de nombreux policiers. La partie centrale et piétonne de Wall Street étant même fermée à la circulation par des postes de contrôle. Rien d'étonnant cependant quand on sait qu'il s'agit à la fois d'un lieu touristique et d'un des plus importants centre mondial de la finance. D'autres rues adjacentes paraissent propices pour accueillir les affiches.

Deuxième zone qui nous a paru intéressante, le parc du pont de Brooklyn qui fait face au sud de Manhattan, de l'autre côté de l'East River. En plus d'offrir une vue sur les impressionnants gratte-ciels du Financial District, ce lieu offre l'avantage d'être une zone de promenade très fréquentée.



1ère session de collage Brooklyn & Wallstreet

Écrit par Mahn Kloix jeudi 7 août 2014

Collage en plein coeur de WallStreet. Photo Yuvany.


Il est 5h. Le réveil sonne. Le soleil se lève sur le Brooklyn Bridge Park vers 6h30. Nous partons avec la boule au ventre. Il est tôt, c'est notre première session de collage et pas des moindres : Brooklyn puis Wall Street. Pas envie de se louper ni de se faire choper.



Le spot sur les anciennes jetées de Brooklyn face à Manhattan est juste parfait… On a le temps, il n'y a que les joggeurs qui sont debouts à cette heure là… Le soleil se lève sur lesbuildings, c'est royal !



Puis direction le quartier d'affaire de Manhattan. Premier collage au abords du quartier puis on plonge au coeur de la machine… Le spot prévu est face à la deutsche bank qui est gardée par un flic black bien balaise… Du coup on change. On redescend Wall Street et je trouve un mur à l'angle de Pearl Sreet. Parfait. Je fais vite, très vite. Des gens s'arrêtent et regardent. Je file.



Rendez-vous sur la Exchange Place, en plein centre du quartier d'affaire. Pas question de coller, c'est ultra surveillé. Je me suis gardé juste une affiche de choix que je placarde avec du scotch double face. Il s'agit du portait de la jeune Chelsea E. qui était là sur place en 2011 brandissant sa pancarte "Amenez moi un lobbyiste"… elle protestait contre les abus de ce petit groupe de financiers américains qui dicte ses lois et dont les crises résonnent chez nous et partout dans le monde…



Elle fut dégagée comme d'autres à coup de gaz au poivre… Vous pouvez voir son témoignage.

Le taff est fini, on s'engouffre dans le métro et on file à l'anglaise.



2eme session de collage dans Chelsea

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep mardi 12 août 2014



Pour notre 2ème session de collage, direction Chelsea. Dans ce quartier s'entremêlent des dizaines de galeries d'art où s'exposent des grands noms de l'art contemporain, de Koons à Sheipard Fairey en passant par xxx. En venant coller ici, notre idée est de permettre au projet d'entrer en résonance avec la scène artistique locale, qu'il soit relayé et que les portraits restent affichés plus longtemps. D'autres artistes de rue ont déjà investi les murs du quartier. Nous sommes heureux de voir que le nouveau mur d'affiches attire l'attention des passants qui déambulent à la recherche de galeries.

Sur le mur d'affiches (Photo Mouhiba) on retrouve les personnes suivantes (de haut en bas et de gauche a droite) :

Ife J. U. & Malik R. Américains, co-fondateurs de Occupy the Hood, dont la mission est d'amener les gens de couleurs à se battre pour leurs droits comme tout autre américain.

Cartouche de gaz utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Dalenda L. Tunisienne, historienne et ancienne directrice générale du Centre de recherche d’études, de documentation et d’information sur la femme (Credif), ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011.

Anonyme Manifestant américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Jihad A. Citoyenne égyptienne, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Yahi A. S. Médecin égyptien, travaillant à la clinique mobile de la place Tahrir, luttant pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Ahmed A. Blogueur activiste et artiste égyptien, connu sous le nom de Psypherise, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Um T. Citoyenne égyptienne, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Stephane M. G. Espagnol, réalisateur documentariste et chroniqueur sur twitter du mouvement 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Pavlos P. Père de famille grec, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.




Hommage à Ali dans #Chelsea

Écrit par Mahn Kloix mardi 12 août 2014

ALI, journaliste canadien. Photo Yuvany.

Sur un mur de Chelsea je colle une affiche qui me tient particulièrement à coeur. Il s'agit de Ali M.
Journaliste canadien, il était en Egypte en 2011 lors du soulèvement pour le départ du président Moubarak.
Nous avions échangé par email en début d'année à propos du projet #smallisbig et quelques semaines plus tard il a perdu la vie dans un bombardement en Syrie.
Je suis toujours très ému...

Mahn






OAKLAND

Arrivée à Oakland (USA)

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep jeudi 14 août 2014



Nous arrivons dans la nuit à Oakland, deuxième destination de notre périple, après 9h de voyage depuis New YorK. : Le décalage est total. Nous avions passé notre dernière journée new-yorkaise à sillonner Harlem, quartier légendaire où s'affiche la fierté afro-américaine. La lutte pour l'égalité et les droits de cette communauté a été menée dans ce bout de Manhattan, nous avons constaté avec plaisir que ce passé est encore présent, dans les discussions des gens, les noms des rues, la musique qui résonne dans les parcs, et même les styles vestimentaires.

Mahn



Nous voilà désormais de l'autre côté des Etats-Unis, à "West Oakland", un autre quartier également majoritairement habité par la communauté noire américaine. Mais, changement d'ambiance : dès notre arrivée, nous croisons dans le métro plusieurs jeunes qui errent, attaqués par la drogue. On les appelle ici les 'crackhead' (personnes dépendantes au crack). La pauvreté du quartier et la misère de certaines personnes sautent aux yeux. Nous apprenons pourtant que c'est dans ce quartier que le mouvement des Black Panters est né. Un premier contact étrange avec la ville (on a le sentiment d'être dans un film de zombies), mais qui en dit long sur sa situation, et illustre sa réputation de ville dangereuse et déshéritée. Cela nous donne un aperçu des raisons qui ont motivé Occupy Oakland, et un début d'explication sur l'ampleur particulière qu'a eu ce mouvement dans cette ville. Les différents mouvements Occupy dénoncent entre autre les inégalités sociales.

Yuv



Oakland (USA) : repérage place Franck Ogawa/Oscar Grant

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep jeudi 14 août 2014



Nous partons à la découverte du centre ville d'Oakland. Direction la place Franck Ogawa, qui a été le théâtre principal des manifestations de 2011. Cette place a été surnommée place Oscar Grant par les participants aux évènements de 2011 en hommage à un jeune noir américain tué par les forces de police en 2009. Ce jeune est devenu le symbole de l'opposition entre les protestataires et les autorités de la ville.

Nous nous rendons d'abord compte que la place est assez vide. Il y a surtout des bâtiments administratifs, dont l'imposante mairie d'Oakland. Seuls quelques SDF squattent les bancs et la pelouse. Nous remarquons rapidement que ces derniers, ainsi que l'ensemble des passants, sont surveillés par des personnes dont l'habit de travail indique qu'ils sont des "ambassadeurs de sécurité" (security ambassador). En leur demandant notre chemin, nous apprenons qu'ils sont employés par la mairie pour être "les yeux et les oreilles" de la police municipale. Ils surveillent le centre ville et doivent signaler tout problème éventuel. Nous en déduisons qu'il nous sera difficile de coller les affiches directement sur cette place. Comme à Wall Street, Mahn trouve cependant un emplacement dans les rues adjacentes qui semble propice à accueillir les portraits des "protestataires".





Collage à Oakland

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep vendredi 15 août 2014

On retrouve sur les affiches Ricardo G. indigné espagnol / Crystallee C. Professeur originaire d'Oakland et activiste américaine d'Occupy Wall Street / Molehe K. citoyen américain, ayant participé à Occupy Oakland / Christina L. indignée grecque / Mona E. journaliste américano-égyptienne, ayant lutté pour le départ du président Moubarak / Chelsea E. photographe américaine d'Occupy Wall Street / Ahmed M. Égyptien co-fondateur du Mouvement de la Jeunesse du 6 avril On retrouve sur les affiches Ricardo G. indigné espagnol / Crystallee C. Professeur originaire d'Oakland et activiste américaine d'Occupy Wall Street / Molehe K. citoyen américain, ayant participé à Occupy Oakland / Christina L. indignée grecque / Mona E. journaliste américano-égyptienne, ayant lutté pour le départ du président Moubarak / Chelsea E. photographe américaine d'Occupy Wall Street / Ahmed M. Égyptien co-fondateur du Mouvement de la Jeunesse du 6 avril


Reveil 6h. Café. Métro. Opération coup de vent :) Un super immeuble nous attend derrière la place centrale Franck Ogawa. Une fresque y figure déjà, il y est écrit « People of Oakland ». Parfait pour accueillir les affiches. Il n'est que 7h du matin, mais déjà beaucoup de monde s'active dans les rues, les ens partent travailler. Derrière le parking sur lequel est situé l'immeuble, les voitures des travailleurs municipaux sortent une à une d'un bâtiment... Il faut faire vite. Mahn colle sa série d'affiches en quelques minutes, et nous filons.

Direction la place Franck Ogawa pour coller une affiche. Une mauvaise surprise nous y attend cependant : à notre arrivée, nous nous rendons compte que tous les regards sont portés sur l'emplacement de notre choix. Un homme, probablement sans abri, pieds nus, s'y trouve encerclé par 3 officiers de police. Il crie « ne me tasez pas » « ne me tasez pas ! ». Il est finalement arrêté et mis à terre sans trop de violence. On remarque qu'un « ambassadeur de sécurité » (security ambassador) se trouve sur le trottoir d'en face et note tout ce qui se passe. Un jeune filme la scène, probablement pour pouvoir témoigner en cas de bavure des policiers. L'ambiance est électrique… toute autre en tous cas que ce que l'on pensait trouver à 7h du matin.





Nous décidons bien sûr de passer notre chemin pour coller l'affiche un peu plus loin.





Et maintenant collage à San Francisco

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep dimanche 17 août 2014



Si nous voulons trouver un quartier artistique, ce ne sera pas à Oakland... Nous décidons de nous rendre dans le quartier de Mission à San Francisco. Ce quartier est connu pour sa scène artistique alternative et notamment ses fresques murales à message politique, d'abord réalisées par des artistes de la communauté latino américaine très présente dans ce quartier. N'ayant pas fait de repérage, nous déambulons longuement à la recherche de rues propices au collage…. Nous marchons, marchons, dans des rues plutôt populaires, avec quelques fresques certes, mais sans trouver le quartier à proprement parlé artistique. Nous tombons sur une fresque qui rend hommage à Oscar Grant, le jeune victime d'une bavure policière dont nous avons parlé dans un post précédent. Un emplacement est libre juste à côté, l'endroit tombe sous le sens. Des jeunes du quartier viennent nous voir et se laissent prendre en photo. :



Sur la photo :

Jon A. S. Espagnol, étudiant en architecture et porte-parole du groupe Democracia Real Ya!, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Saleh M. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Dax P. Père de famille américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Ali M. Journaliste canadien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011. Il a perdu la vie dans un bombardement en Syrie en mars 2014.

Cartouche de balle caoutchouc utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Ahmed H. Dentiste égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe. Il a perdu la vue après avoir reçu des balles en caoutchouc dans les yeux en janvier et novembre 2011.

Sayda A. M. Mère de famille tunisienne. Son fils Hilme, ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011, a été tué par un sniper le jour du départ de ce dernier.

Anas A. Étudiant en télécommunication égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.




Halte à Clarion alley à San Francisco

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep dimanche 17 août 2014



Nous revenons sur nos pas et finissons par trouver l'endroit où ça se passe. Clarion Alley : une petite rue piétonne où des dizaines de fresques se superposent les unes aux autres… Le résultat est assez psychédélique : https://www.google.com/search?q=clarion+alley&tbm=isch. Il reste deux affiches à coller. Des dizaines de badauds passent et regardent. L'occasion d’interagir avec eux.

Rencontre avec Skum

C'est avec un SDF de la rue que nous aurons l'échange le plus intéressant. Il s'appelle Scott, alias Skum... En argot, skum est une insulte qui renvoie à un déchet, à quelque chose d'inutile dont on voudrait se débarrasser. Scott a choisi ce pseudo car il considère qu'il résume bien la façon dont la société le considère. La quarantaine d'années passée, avec son air de gavroche version américaine, il propose avec gouaille « une blague pour de la monnaie » aux passants. Malgré un taux d’alcoolémie visiblement élevé et un langage plutôt fleuri, il porte un regard lucide (et acide) sur son pays.

Il a participé à Occupy Wall Street, se trouvant à New York en 2011. Il nous dit avoir adhéré aux messages portés par ce mouvement en raison de la façon dont les riches méprisent les pauvres dans son pays. Pour illustrer cela, il nous exprime longuement sa colère vis à vis de la façon dont son traités les SDF à San Francisco : une interdiction de s'asseoir en journée dans la rue est récemment entrée en vigueur. La police lui colle régulièrement des amendes simplement parce qu'il est assis dans la rue. Skum se sent de plus en plus indésirable dans les rues de San Francisco, une ville qui s'embourgeoise à grande vitesse ces dernières années. Le quartier populaire de Mission où nous nous trouvons faisant particulièrement les frais de cette gentrification.

Concernant les manifestations d'Occupy Wall Street, il dit cependant les avoir trouvées trop violentes. « Ça peut sembler bizarre de la part d'un gars comme moi, mais il faut qu'il y ait des gens, un comité, quelque chose, qui vienne et mette les éléments perturbateurs dehors. Sans ça, ça ne peut pas marcher. Il y avait trop de gens qui foutaient le bordel ». Il nous explique alors être un ancien marine. Ayant fait la guerre en Irak et au Koweït, il ne veut plus être mêlé à aucune violence. Il a donc rapidement cessé de participer aux manifestations. Il dit cependant que selon lui, si les différences sociales continuent à se creuser, la prochaine guerre mondiale sera celle des pauvres contre les riches. Il prend alors l'exemple des Misérables, un livre dont l'histoire l'a particulièrement touché, et qu'il nous raconte avec engouement : « Et alors, ce sera comme dans les Misérables, ce sera une putain de révolution (une « revo-fucking-lution »), et ce sera sanglant ! ». Puis, alors qu'il évoque les injustices subies par Jean Valjean dans ce roman et la façon dont le personnage a réussi a rester droit malgré les épreuves, les larmes lui montent aux yeux. Fin de l'entretien.

Mahn Kloix & Yuvany Gnep





Sur les photos :

Marianna R. Manager en communication grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Melanisia C. J. Citoyenne américaine, ayant participé à Occupy Oakland mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.




Mahn Kloix sur les murs de #Berkeley

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep lundi 18 août 2014



Dernier lieu emblématique, progressiste et contestataire où nous nous rendons dans la baie : l'université de Berkeley, plus ancienne université de Californie. Nous arrivons sur la Telegraph avenue, l'atmosphère est particulière. Étudiants, punks, hippies, hipsters squattent les rues. Juste derrière l'avenue, certains se réveillent dans le "People's Park", ambiance longues barbes, tatouages et poches percées. L'ambiance est très détendue et nous nous y immergeons sans difficulté.

Nous tombons sur le Mediterraneum Cafe, lieu emblématique du quartier, il aurait été un des repères des Black Panthers. Nous rencontrons Michael, vétéran de la guerre en Irak (encore un !), devenu un brin illuminé… Nous discutons, il nous propose de lire les cartes de Taro. Nous lui posons des questions sur Occupy Oakland. Il a participé aux événement en 2011. Il a été voir ce qui s'y passait mais sans être vraiment impliqué. Il a été attiré par l'air de changement qui se profilait mais décrit le manque d'unité dans les messages de protestation. Et il n'adhère pas avec le message des 99% du peuple contre les 1% de riches prospères, selon lui nous ne sommes que un, les 100%. Il n'est pas resté.

À la sortie du café, un magnifique panneau abandonné sur un terrain vague nous attend pour le dernier collage aux États Unis… Plusieurs fresques entourent le terrain. Elles relatent l'histoire et l'identité du quartier.

Après le collage nous retournons au Mediterraneum Cafe et rencontrons C. Il vit à Oakland depuis 33 ans et travaille au port. En raison de sa participation à Occupy Oakland et de son appartenance à un syndicat de travailleurs du port, il ne veut pas être filmé mais nous discutons longuement. Selon lui, les plus gros problèmes d'Oakland, ceux qui ont déclenché Occupy Oakland, sont les disparités sociales et la situation des jeunes noirs américains. Il est justement accompagné d'une jeune femme qui nous témoigne de sa difficulté à trouver un travail. Pour lui, le mouvement s'inscrit dans l'histoire américaine, il hérite d'autres événements célèbres comme la marche de la "Bonus Army" en 1932, ou celles de Martin Luther King dans les années 1960. Il regrette par contre que contrairement à ces dernières, les événements de 2011 aient pris une tournure violente. Il dénonce les provocations policières vis à vis de la foule qui selon lui ont été à l'origine des réponses violentes des manifestants. Le manque d'unité au niveau national et d'encadrement des mouvements Occupy les rendant faciles à déstabiliser. Il a cela dit trouvé merveilleux de voir tous ces gens se regrouper et de lui-même faire partie des événements. Malheureusement, il pense que cela n'a pas eu de conséquences dans l'immédiat, et qu'il faudra attendre la prochaine génération pour en voir les fruits.

Arriver à Oakland, San Francisco et Berkley c'est plonger dans 3 univers voisins très différents : des quartiers aisés de San Francisco, aux quartiers déshérités de Oakland en passant par l'université progressiste de Berkeley. L'histoire est complexe et passionnante.







On retrouve sur la photo ci-dessus

Ahmed A. Blogueur activiste et artiste égyptien, connu sous le nom de Psypherise, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Lina B. M. Cyber-dissidente tunisienne, ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011. Son blog a été considéré comme la voix de la révolte tunisienne.

Joanne S. Activiste américaine, s'étant présentée aux élections pour représenter le 53e district de l'assemblée du Wisconsin. A écrit son manifeste et l'a porté accroché sur son dos lors de manifestations devant le Capitole en 2011.

Omar M. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Sadi T. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Carmen R. Espagnole membre de la comisión de Economía del movimiento 15M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Jihad A. Citoyenne égyptienne, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Natalia K. & Antonis Couple grec, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Cartouche de gaz utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Emil S. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011, il porte un panneau sur lequel est écrit "Le peuple veut le départ du Field Marshal", le commandant en chef des forces armées égyptiennes.

Ray L. Officier de police américain à la retraite, ayant participé à Occupy Wall Street, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier. Il protestait contre les violences policières faites envers les manifestants en 2011.

Yahi A. S. Médecin égyptien, travaillant à la clinique mobile de la place Tahrir, luttant pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Mannoubia B. Mère de famille tunisienne. Son fils Mohammed Bouazizi, vendeur de rue, s'est immolé par le feu par désespoir pendant le régime de Ben Ali. Cet événement déclencha le printemps arabe en 2011.

Aldo Citoyen, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.




Rencontre avec #Crystallee Crain

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep mardi 19 août 2014

Mahn Kloix et Crystelle Crain


Aujourd'hui nous rencontrons Crystallee Crain. Elle fait partie des gens dont Mahn colle le portait dans les rues. Professeur et activiste, elle enseigne les sciences politiques à l'université de Californie à Oakland

Pourquoi es-tu descendue dans la rue en 2011 lors de Occupy Oakland?

Personnellement, je serais descendue dans la rue quoi qu'il se passe, cela fait 10 ans que je suis engagée dans ce type d'activisme social et politique. Le directeur de l'université m'a autorisée à emmener mes étudiants à Occupy Oakland, c'était un parfait terrain d'étude pour eux.

Notre éducation, la manière dont nous grandissons aux États-Unis a un impact énorme sur notre manière de nous représenter comme des citoyens pouvant faire changer les choses. Nous sommes davantage éduqués à ne voir que notre intérêt individuel. La question du collectif est quelques chose que nous maîtrisons mal.

Pourquoi penses-tu qu'autant de gens sont descendus dans la rue?

Les gens étaient en colère et il le sont toujours. Les gens ont manifesté pour leurs droits. Ils n'étaient pas satisfaits d'Obama, et ils se sentaient déjà rejetés par l'administration de Bush. Nous souffrons tous des pressions du système dans lequel nous vivons d'une manière ou d'une autre, mais si vous n'en voyez pas les bénéfices, vous ressentez le besoin de le manifester.

Que penses-tu que cela a changé?

D'une manière générale, des relations entre les gens se sont créées, certains se sont engagés en politique. Ils travaillent aujourd'hui ensemble au niveau local pour combattre les violences policières, il y a des programmes de distribution de nourriture, des nouvelles bibliothèques se sont créées. Occupy a montré aux gens qu'ils n'avaient pas nécessairement besoin de faire partie d'un parti politique ou d'être influent sur Twitter pour pouvoir agir.

A un niveau supérieur, il y a eu un impact de façon certaine. Les élections sont un bon exemple. Quand Romney, opposant à Obama, avait comparé 47% de la population américaine à des parasites du système, cela fit un tollé. Ca n'aurait pas été le cas avant. La notion que la plupart d'entre nous faisons partie des 99%, véhiculée par les mouvements Occupy, avait fait son chemin dans l'esprit des gens. Un autre exemple est le succès de Elisabeth Warren, sénatrice du Massachusetts. Elle a réussi a imposer ses idées d'encadrement et de surveillance des banques américaines, elle n'aurait pas eu autant de crédit si les gens d'Occupy n'avaient pas déjà poussé les choses dans cette direction.

Et demain?

Pour le futur, je pense que toute forme de résistance est utilise, même si c'est une action individuelle. Si tu ne te manifestes pas, que peux tu attendre?

Par ailleurs, Crystallee Crain vient tout juste de créer une plateforme appelée "Peaceful Profits" dont un partie des bénéfices vont aux artistes et à des avocats aidant les populations de Oakland. Mahn a réalisé des visuels pour l'association fin juillet. A notre arrivée, des T-shirts sont déjà imprimés :)





Rencontre avec Chelsea Elliot

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep mercredi 20 août 2014



Rencontre avec Chelsea Elliot. Elle fait partie des gens dont Mahn colle le portait dans les rues.

Pourquoi es-tu descendue dans la rue en 2011 lors de Occupy Wall Street ?

J'avais lu ce livre "Griftopia" de Matt Taibbi. Avant je pensais que la crise était due au hasard, je ne pouvais pas imaginer que la crise pouvait servir les intérêts de certains. Un jour j'ai entendu parlé d'un mouvement de protestation à Wall Street via le compte Twitter d'un rappeur. Je n'avais pas de boulot à ce moment là, alors je me suis dit "Faisons quelque chose de productif, allons voir ce qu'il se passe. Quand je suis arrivée, il n'y avait que 30 personnes. C'était un tout petit groupe. Nous avons commencé à écrire des messages sur des pancartes. À ce moment là, nous invitions les policiers à nous rejoindre et nous chantions sous la pluie. Nous dansions, c'était très fun. Un semaine ou deux plus tard, il y a eu une grande marche. Nous avons été séparés avec mes amis. J'ai été bloquée par une policière. Je me suis retrouvée avec une fille qui criait et insultait les flics. Un flic est venu et l'a plaquée au sol, puis trainée par terre. Son visage était recouvert de sang. Cela m'a choquée et je leur ai demandé d'arrêter... Un d'eux est venu et m'a aspergée de gaz au poivre. J'ai ressenti une douleur incroyable.

Que c'est-il passé après la diffusion de la vidéo où l'on voit les forces de l'ordre t'asperger de gaz au poivre ? L'attention des médias sur cet événement fut importante car dans notre pays les gens n'ont pas l'habitude voir une femme blanche se faire gazer par les forces de l'ordre. Si cela arrive à une personne de couleur, tout le monde s'en fout. Et d'une manière général, ce jour là fut particulièrement violent. Beaucoup de gens furent choqués et ont rejoint le mouvement. C'est devenu de plus en plus gros. Ensuite, les forces de l'ordre se sont mises à nous filmer en permanence. C'était très oppressant.

Pourquoi penses-tu qu'autant des gens sont descendus dans la rue ? Pour le première fois, beaucoup de gens ont pris conscience que les masses populaires souffraient, que les inégalités dans ce pays sont les mêmes que dans les années 1920. Les gens sont venus pour des raisons parfois différentes et il était difficile de centraliser les messages. Aussi, le problème c'est qu'ici, les gens n'ont pas l'habitude de manifester. Il n'y avait pas assez de coordination au niveau national.

Que penses-tu que cela a changé ? Cela a changé beaucoup de choses. J'ai le sentiment qu'aux États-Unis la plupart des jeunes n'ont pas l'habitude de protester. Cela a réuni énormément de gens et fait naître une conscience activiste. Les échanges sur internet ont été énormes. La notion des 99% est devenus un état de fait. Beaucoup de personnes pauvres qui pensaient être isolés ont pu voir que se rassembler les rendaient plus forts.

Qu'est-ce que cela a changé pour toi ? Je n'avais pas imaginé avant le pouvoir de la mobilisation. Cela m'a aidée à trouver ma voix. Comme plusieurs de mes amis, cela a changé l'orientation de nos vies. Une amie est devenue très active sur internet. Je partage aujourd'hui aussi beaucoup d'informations sur les réseaux sociaux.

Où en est le mouvement Occupy aujourd'hui ? Le mouvement s'est décentralisé mais je pense que l'esprit Occuppy est toujours là. Cela se passe plus sur internet aujourd'hui.
Occupy c'était le bon endroit au bon moment. C'était fun !

Et demain ? Je ne sais pas. Je pense que les inégalités dans ce pays et dans le monde sont un grave problème. Occupy a couvert tout un ensemble de problèmes, des inégalités sociales aux violences policières en passant par le racisme envers les gens de couleurs. Nous pouvons désormais parler ouvertement de ces sujets et la discussion ne fait que commencer.

M&Y






MADRID

Collage Puerta del Sol à #Madrid

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep lundi 25 août 2014

Carmen R. Espagnole, membre de la Comisión de Economía del movimiento 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers Carmen R. Espagnole, membre de la Comisión de Economía del movimiento 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers Carmen R. Espagnole, membre de la Comisión de Economía del movimiento 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers


Après 9h de vol entre Oakland et New-York, 8h d'attente, et à nouveau 7h de vol entre New-York et Marseille, nous arrivons épuisés à Marseille. 48h plus tard nous voilà à Madrid.

Vu la fatigue accumulée et le décalage horaire, nous décidons de faire le collage dans le centre à l'heure de la sieste espagnole ! Nous espérons que les endroits choisis, des plus fréquentés à Madrid, le seront moins. Nous partons donc à 15h pour coller une série d'affiches dans le centre. Mais, contre toute attente, les gens ne font pas du tout la sieste :) c'est bondé de monde... Tant pis ou tant mieux. Nous collons d'abord 6 affiches sur un magasin fermé, Puerta del Sol, la place où ont principalement eu lieu les manifestations des Indignés e 2011. Nous nous rendons ensuite place de l'Opéra, où Mahn colle 9 affiches sur un magnifique kiosque, puis 2 Plaza Mayor et enfin une dernière au milieu de la Puerta del Sol. Cela relève plus du happening qu'autre chose car les affiches ne resterons surement pas longtemps.

Petit rappel des faits concernant le mouvement des Indignés en Espagne : en 2011, suite à une manifestation le 15 mai à l'appel du mouvement ¡Democracia Real Ya! (Une vraie démocratie, maintenant), de nombreux manifestants ont occupé la place Puerta del Sol pendant plus d'une semaine, nuit et jour. Des dizaines de milliers de personnes s'y réunirent chaque jour, débattant et s'appropriant l'espace public. À la manière de la place Tahrir au Caire lors de la révolution égyptienne de 2011, la Puerta del Sol est devenue un symbole de la lutte en faveur d'une vraie démocratie lors des manifestations de mai 2011 en Espagne.

Retrouvez les Indignés espagnols qui se trouvent dans la série de portraits sur mon facebook

Olmo G. Espagnol, responsable des réseaux sociaux du groupe Democracia Real Ya!, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Cartouche de balle utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Ahmed H. Dentiste égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe. Il a perdu la vue après avoir reçu des balles en caoutchouc dans les yeux en janvier et novembre 2011.


Stephane M. G. Espagnol, réalisateur documentariste et chroniqueur sur twitter du mouvement 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Lina B. M. Protestataire tunisienne ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011. Cyber-dissidente dont le blog a été considéré comme la voix de la révolte tunisienne.

Molly K. Américaine diplômée en art et histoire de l'architecture. Elle a lancé la pétition "Dites non aux frais de carte de crédit chez Bank of America" qui a fait plier la banque en question.


Iphone cassé pendant les manifestations pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

George A. Docteur en sociologie et DJ grec ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.


Ricardo G. Espagnol, ingénieur industriel et membre du groupe de travail de Economía de Sol, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.


Pavlos P. Père de famille grec, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Dalenda L. Tunisienne, historienne et ancienne directrice générale du Centre de recherche d'études, de documentation et d'information sur la femme (Credif), ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011.




Repérage et collage à #Lavapiès

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep jeudi 28 août 2014

Photos de la Tabacalera


Après avoir cherché un endroit où coller dans le quartier branché de Malasaña, nous constatons que le quartier n'est pas aussi dynamique que nous le pensions. Nous décidons de nous intéresser à Lavapiès, qui se trouve être celui où nous résidons.

Pourquoi aller chercher plus loin ? Lavapiès correspond en effet à plusieurs égards à ce que nous recherchons pour la deuxième session de collage. C'est un quartier très ancien du centre de Madrid, à la fois populaire et investi par de nombreuses initiatives d'art engagé. Ancien quartier juif, il est aujourd'hui peuplé en grande partie de différentes populations fraichement immigrées. La plupart des petites échoppes sont tenues par des Chinois, beaucoup de restaurants sont indiens et d'Afrique du Nord, etc. Les loyers bas ont aussi attiré de nombreux jeunes et artistes. De nombreux graffitis à message politique sont visibles dans les rues. Il y a beaucoup de petites places très animées le soir, des jeunes et des vieux de toutes origines s'assoient là où il peuvent pour discuter, des enfants jouent avec ce qu'ils peuvent, les dealers attendent leurs clients. On se croirait quelque part à Belleville à Paris, où dans le centre de Marseille.

Comme à Marseille d'ailleurs, une grande usine de tabac du quartier récemment fermée a été en partie reconvertie en centre artistique : la Tabacalera. http://latabacalera.net/ Après avoir sillonné les rues à la recherche d'endroits propices au collage, Mahn se rend dans ce lieu sur conseil d'amis madrilènes. C´est un espace "auto-géré" où l'on peut pratiquer diverses activités comme le théâtre, la musique, la danse, la peinture, l´art audiovisuel. Il y est organisé des conférences, des ateliers de tout genre, divers événements et interactions avec le quartier, etc. Malheureusement, le lieu est quasiment vide : comme beaucoup de Madrilènes, la majorité des personnes ayant investi les lieux ont fuit la chaleur et la torpeur de la capitale, c'est les vacances... La plupart des gens que nous espérions rencontrer à Madrid sont d'ailleurs également absents. La Tabacalera est un dédale de pièces et de couloirs. Au sous-sol, les murs sont recouverts de peintures et de fresques, une véritable galerie de street art. L'endroit est passionnant et rêvé pour mon projet. Malheureusement, aucun interlocuteur n'est présent, il semble impossible d'y réaliser quelque chose dans les jours qui suivent.

Le collage se fera donc sur une petite place du quartier.

L'emplacement choisi par Mahn se trouve non loin de la Tabacalera, sur une petite place située dans la même rue de Los Embajadores. Il se situe à côté d'une vielle église en ruine de las Escuelas Pias de San Fernando, transformée en bibliothèque. Nous restons sur notre "stratégie de la sieste" : nous y retournons vers 17h. La stratégie fonctionne cette fois très bien : la place est presque déserte : il n'y a presque pas d'ombre et la chaleur est écrasante. Aucun policier en vue, les rares personnes qui traversent la place marchent nonchalamment sous le soleil de plomb. L'ambiance est détendue, voir endormie.

Les rares personnes qui passent à côté du mur s'arrêtent pour observer le collage et discuter avec Mahn. Une fois l'opération terminée, nous allons nous rafraichir dans une échoppe où nous discutons quelque temps avec les personnes s'y trouvant et qui nous ont observés pendant toute la session. L'un d'entre eux, Antonio, même s'il n'a pas participé manifestations de 2011 est intéressé par la question et nous livre son sentiment sur la situation en Espagne :

"Les gens ont peur, en Espagne. Ils ont peur d'investir, de créer une entreprise, etc. En fait le problème, ce n'est pas la crise, pour nous le problème c'est les politiques. Les gens n'ont plus confiance. Les jeunes, même s'ils étudient et ont de très bons diplômes, ils ont peur de ne pas trouver de travail. Le pays ne progresse plus, au contraire. L'Espagne est passé de la 4ème puissance européenne à la 28ème. Le problème avec les manifestations c'est que certains groupes radicaux ont fait du vandalisme, ont provoqué la police, etc. Je ne sais pas si il y a eu des répercussions politiques, mais au moins dans l'esprit des gens, ça a changé les choses, moi y compris. Les gens se sont rendu compte, qu'ils pouvaient demander des comptes aux politiques. Au début, les politiques ont réglé certaines petites choses ci et là, mais il y a toujours beaucoup de choses à régler, et les gens sont fatigués de tout ça. Aujourd'hui, la majorité des gens vivent au jour le jour. Je ne pense pas que la situation va s'améliorer dans les prochaines années. On va continuer à vivre comme ça quelques années encore, et après ça recommencera à aller mieux. Pour que ça marche, il faut que les valeurs changent, les valeurs des politiques, la bourse, tout ça. Mais pour moi, le monde de l'entreprise aujourd'hui a trop peur d'investir, et c'est là le vrai problème."

De haut en bas Emil S. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011, il porte un panneau sur lequel est écrit "Le peuple veut le départ du Field Marshal", le commandant en chef des forces armées égyptiennes.

Molehe K. Citoyen américain, ayant participé à Occupy Oakland mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Um T. Civile égyptienne ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Ray L. Officier de police américain à la retraite, ayant participé à Occupy Wall Street, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier. Il protestait contre les violences policières faites envers les manifestants en 2011.

Mannoubia B. Mère de famille tunisienne. Son fils Mohammed Bouazizi, vendeur de rue, s'est immolé par le feu par désespoir pendant le régime de Ben Ali. Cet événement déclencha le printemps arabe en 2011.

Cartouche de balle utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Christina L. Grecque, chef de produit dans la mode, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Anonyme Manifestant américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Ydanis R. Conseiller municipal de la ville de New York, ayant participé à Occupy Wall Street, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Sadi T. Civil égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Dax P. Père de famille américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Aldo Civil ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.













TUNIS

Arrivée à #Tunis

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep lundi 1 septembre 2014



Changement de décor. Nous quittons la torpeur de Madrid pour arriver à Tunis. La chaleur est encore plus écrasante, mais les rues davantage animées. Les rencontres que nous ferons dans le cadre du projet vont aussi nous plonger dans une tout autre ambiance. La révolution et ses conséquences sont encore très présentes à l’esprit de tous. La liberté attendue et l’amélioration des conditions de vie espérée sont loin d’être au rendez-vous.

Nous avons pris contact avec un groupe de graffeurs nommé Zwewla, ce qui signifie "les misérables" en dialecte tunisien. Ils graffent les rues de Tunis et d’autres villes tunisiennes pour revendiquer liberté d'expression, justice sociale et économique, respect des droits de l’homme, etc.

Leur page Facebook est consultable ici :https://www.facebook.com/pages/Zwewla/244524092300855

Ils nous expliquent la nécessité de leur action par la situation actuelle de leur pays, alarmante à plusieurs égards. Malgré les quelques mois de liberté qui ont suivi la révolution en 2011, la Tunisie est aujourd’hui confrontée à une situation économique dégradée, à la montée de l’islamisme et au retour ou au maintien des anciens membres de l'administration Ben Ali… Nous aurons l'occasion d'aborder ces sujets plus en détails lors de interview de l'activiste et bloggeuse Lina Ben Mhenni.

Les membres de Zwewla sont prêts à nous aider et veulent que nous fassions aussi des choses ensemble. Nous commençons par nous rendre dans le quartier de Sidi Hassine, tout à l’ouest de Tunis, sur proposition des membres de Zwewla. C’est un quartier déshérité, où le chômage est important et où les idées extrémistes gagnent du terrain. Les rues poussiéreuses sont bordées de petites maisons en bétons pas toujours terminées. Le quartier est calme, c’est le milieu de la journée, des gamins trainent dans les rues. Je rencontre Saber, la quarantaine, qui gère le centre Jeunesse et culture du quartier. Il a la ferme conviction que la culture aidera les jeunes de ce quartier. Au programme : sport, théâtre, une web-radio… Il a déjà collaboré à plusieurs reprises avec les membres de Zwewla. Nous trouvons un emplacement sur les murs du centre qui accueillera 6 affiches. Juste au dessus d'un pochoir dessiné par un des membres de Zwewla : Khalil Awafi Salhi

Des gamins passent, ils nous disent, le sourire au lèvres, qu’ils préfèreraient que soient collées des photos porno J

Katerina P. Femme d'affaire grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Andre L. Artiste américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Jihad A. Civile égyptienne ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Mannoubia B. Mère de famille tunisienne. Son fils Mohammed Bouazizi, vendeur de rue, s'est immolé par le feu par désespoir pendant le régime de Ben Ali. Cet événement déclencha le printemps arabe en 2011.

Ife J. U. & Malik R. Américains, co-fondateurs de Occupy the Hood, dont la mission est d'amener les gens de couleurs à se battre pour leurs droits comme tout autre américain.

Lina B. M. Protestataire tunisienne ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011. Cyber-dissidente dont le blog a été considéré comme la voix de la révolte tunisienne.




En Tunisie, "Il faut faire une autre révolution"

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep vendredi 5 septembre 2014



Nous avons rendez-vous avec Lina Ben Mhenni, activiste et bloggeuse, au café du théâtre de l'Étoile. À notre arrivée nous avons la surprise de voir qu'elle est accompagnée par un policier, elle nous explique qu’il est en charge de sa protection en raison de différentes menaces qu’elle a reçu. C'est une Lina sous pression que nous rencontrons. Elle répond à nos questions sans mâcher ses mots.

Qui es-tu et pourquoi as-tu participé au Printemps arabe en Tunisie ?

"Je m'appelle Lina, je suis Tunisienne. J'ai 31 ans et suis assistante universitaire : j'enseigne la linguistique à la faculté de sciences humaines et sociales de Tunis. Je suis bloggeuse, activiste et surtout, je suis une citoyenne tunisienne toujours à la recherche de sa citoyenneté complète.

J'ai grandi dans un milieu engagé, mon père est un ex prisonnier politique. Ma mère était très engagée aussi à la faculté quand elle était jeune. Il y avait plein de réunion d'Amnesty International qui se passaient chez nous, quand l'organisme était interdit en Tunisie. J'ai connu toutes les régions de la Tunisie depuis mon enfance. J'ai vu l'écart entre les discours officiels racontant que tout va bien en Tunisie et la réalité des choses. J'ai vu la pauvreté, j'étais consciente de l'existence de la torture en Tunisie et des différentes atteintes aux droits de l'homme, ainsi que des problèmes liés à la censure.

Comment la révolte a-t-elle commencé ?

En 2011, on a appris l'immolation par le feu de Mohammed Bouazizi. Personnellement, j'étais très choquée parce que quelques mois auparavant avait eu lieu une autre immolation et celle-ci était presque passée inaperçue. Nous en avions parlé un peu sur nos blogs mais l' État ou le régime de Ben Ali a réussi à faire taire la famille de la victime en lui donnant de l’argent et en la menaçant. Contrairement à cette fois-ci, à Sidi Bouzid, une manifestation a directement eu lieu. Alors qu’en 2008, avec le mouvement social du bassin minier, il y avait eu des morts, des martyrs, mais le régime a réussi à imposer un black out médiatique. Nous en avions parlé sur nos blogs mais c'était resté sur les blogs. Entre 2008 et 2011, nous avons acquis une certaine expérience. Nous avons fait beaucoup de campagnes en ligne contre la censure ou pour soutenir des prisonniers politiques. Donc, en 2011, cela c'est passé de manière automatique. Grâce aux réseaux sociaux comme Facebook et Twitter, on a réussi à relayer l'information.

Qu'as-tu fait ?

J'ai ouvert mon blog en 2007. Il ne s'agit pas d'un mouvement bien organisé ou d'un groupe, en Tunisie cela se passe de manière aléatoire. Nous nous connaissons entre bloggeurs. Quand il y a un problème, chacun propose une idée et on y adhère ou non. Pendant les événements, je suis partie dans différentes régions où il y avait des mouvements populaires. Je prenais des photos et je filmais, je balançais ça sur le blog et les autres relayaient. Et moi, je faisais la même chose avec le travail des autres bloggeurs. Il n'y avait pas vraiment de stratégie.



Pourquoi les gens se sont-ils révoltés ?

Les gens sont descendus dans la rue parce qu'ils avaient subi des années de répression et d'oppression. Le fait que Mohamed Bouazizi soit jeune a fait que les jeunes se sont identifiés et ont voulu agir. C'est l’accumulation des choses, ça bouillonnait depuis longtemps. Il y a eu cet évènement déclencheur et les réseaux sociaux ont contribué à la mobilisation. Des manifestations ont été organisées à travers des événements Facebook par exemple. C'était un mouvement spontané.

Et aujourd'hui, quelle est la situation ?

Aujourd'hui, après tout ce que nous avons vécu, il y a des gens qui malheureusement regrettent Ben Ali. Des théories du complot circulent et disent que les États-Unis auraient organisé tout cela, que les bloggeurs seraient payés par les États-Unis. Personnellement, je n'ai été poussée par personne, j'y ai cru et ça fait des années qu'on recherche liberté et dignité. Ce n'est pas nouveau. Pareil pour les jeunes des différentes régions. Je ne pense pas que les États-Unis ont ordonné à Mohammed Bouazizi de s'immoler… Il faut être logique

Aujourd'hui, finalement, la situation n'est pas très bonne. Rien n'est clair. Après les 1ères élections nous avons eu un gouvernement islamiste et il s'est avéré qu'ils étaient incompétents. Les islamistes ne vont nous mener nulle part. On parle de terrorisme en Tunisie. La vie devient de plus en plus chère, le taux de chômage augmente. Il y a eu régression. Même au niveau de la liberté d'expression, on n'avance pas. C'est vrai qu'on a eu quelques mois de liberté d'expression.

On a entendu parler d'une police républicaine [rire]. En tant qu'activiste, je reçois des messages de personnes torturées par la police chaque jour, agressées que ce soit verbalement ou physiquement… Aujourd'hui il n'y a plus de censure sur internet et dans les journaux. En fait, tu peux dire tout ce que tu veux mais tu risques de te retrouver en prison, on te colle un procès qui arrive de nulle part. Pour moi il ne s'agit pas de liberté d'expression.

Moi-même, sur le plan personnel, j'étais plus libre auparavant. Aujourd'hui, je vis sous la protection rapprochée de la police. Mon nom figure sur une liste de liquidation. Si je veux partir de Tunis, je dois prévenir la police 48h à l'avance pour qu'ils envoient quelqu'un pour m’accompagner. C'est compliqué.

Comme je suis indépendante, je suis attaquée de partout. Les islamistes, la police et même la gauche. Quand je dénonce la torture, certaines personnes faisant partie de la police m'attaquent…

Et la démocratie dans tout ça ?

Aujourd'hui, il n'y a pas de démocratie. C'est un mensonge. La tête du système n’est plus là, mais le système est toujours là. Les gens qui travaillaient pour Ben Ali et qui ont été arrêtés, sont libres maintenant. Ils participeront aux prochaines élections. Et les gens ont tellement souffert avec les islamistes qu'ils sont prêts à voir Ben Ali revenir. Il y a des gens qui revendiquent le retour de Ben Ali. Il y a eu une constitution qui serait soit disant révolutionnaire, mais les articles peuvent être interprétés dans beaucoup de sens et laisser une dictature se remettre en place. On dit que cette constitution est moderniste et progressiste, etc. mais ce n'est que de l'encre sur du papier. On parle du droit des femmes et des droits de l'homme, mais dans la pratique, c'est très différent. Si une femme agressée porte plainte dans un poste de police, elle sera toujours accusée d'être fautive… Il ne s'agit pas d'une histoire de lois, il s'agit de la pratique, de volonté politique, mais cette volonté n'existe pas.

Je ne suis pas très optimiste. N'oublions pas que c'est une question d'argent, de moyens, de campagne électorale. Aujourd’hui, le jeu démocratique se fait entre les islamistes et les anciens de Ben Ali. Ce sont les 2 pôles les plus forts. Il y a plein d'alternatives mais c'est une question de moyen et de lobbying. Il faut être réaliste.

Dans le passé je rêvais beaucoup. Aujourd'hui, les gens veulent que ce soit comme avant. Ce qu’ils veulent, c’est la sécurité et de la nourriture. On ne parle plus de dignité et de liberté.

Les islamistes sont forts. Ils font du travail de terrain, ils vont là où les autres ne vont pas. Ils promettent de l'argent. Ils sont très bien organisés.

Et demain ?

Tant qu'il y a des jeunes qui luttent, que ce soit des artistes, des rappeurs, des artistes de rue, des femmes et des hommes de théâtre qui tiennent à leur rêvent et qui sortent dans la rue chaque fois qu'il faut sortir dans la rue, je reste optimiste. Au niveau politique, les gens sont contents du nouveau gouvernement, mis en place après les islamistes. Mais les islamistes se sont implantés un peu partout. Ce sont eux qui gouvernent réellement le pays en ce moment.

Il faut persevérer et être patient. On ne change pas tout un système en quelques années. On va souffrir encore pendant une dizaine d'années minimum. Espérons que les choses changeront après. Ce n'est pas évident. Pour moi-même, je ne suis plus optimiste. Il faut penser aux générations d'après.

Sous le régime de Ben Ali, on revendiquait l'égalité homme/femme, entre autre concernant les droits d'héritage. Ces 4 dernières années, nous avons lutté pour conserver les droits que nous avions déjà. Avant on demandait plus, mais là on a travaillé dans le but de conserver ce que on avait déjà. Et tout cela, ça reste du papier. Dans la pratique, c’est horrible.

Je suis très « ambitieuse » [ndlr : pour l’avenir du pays]… On ne fait pas une révolution pour avoir ce que l'on a déjà. Il faut faire une autre révolution, à mon avis.



Collages dans la Medina

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep lundi 8 septembre 2014

Personne n'est au dessus des lois, tout le monde est au dessus des pauvres. Personne n'est au dessus des lois, tout le monde est au dessus des pauvres. Photo Yuvany Gnep.


Rendez-vous à la mosquée Zitouna au coeur de la médina de Tunis avec O., membre du groupe de graffeurs Zwewla. Le premier soir, nous collons les affiches dans un lieu assez passant, prêt d'une école de musique traditionnelle. Il faut faire très vite. O. nous explique que la médina est surveillée des "gardiens", répartis un peu partout dans l'enceinte de la vieille ville.

Un gardien du quartier passe justement alors que nous finissons le collage. O. invente une histoire de partenariat avec l'école de musique, et nous filons. O. est assez tendu. En 2012, il a déjà fait l'objet de poursuites suite à des graffitis dans la ville de Gabès en 2012. Le procès qui l'a visé, ainsi qu'un autre membre de Zwewla, avait donné lieu à une mobilisation importante sur les réseaux, en raison de la disproportion des chefs d'accusation au regard du délit. Alors que le message du graffiti reproché disait: « les pauvres sont des morts vivants », les grapheurs ont été accusés de diffusion de fausses informations portant atteinte à l’ordre public, violation de l’État d’urgence et écriture sans autorisation sur des bâtiments publics. Seul le dernier chef avait finalement été pris en compte, pour lequel une amende de 100 dinars avait été retenue.

2eme collage dans la médina

Deuxième soir, rendez-vous à 19h avec 4 membres du collectif Zwewla. Nous souhaitons cette fois-ci travailler ensemble et mélanger les graffs et pochoirs de Zwewla avec les affiches de Mahn. Les messages portés par le collectif tunisien se marient parfaitement au propos du projet Small is Big. Les graffs et les pochoirs de Zwewla dénoncent l'injustice sociale et appellent la frange la plus pauvre de la société tunisienne à ne pas rester passive face aux difficultés qui les accablent, en réclamant le respect de leurs droits. Nous partons donc ensemble en repérage dans la vieille ville et choisissons rapidement quelques murs.

Le premier mur se situe dans un très beau passage voûté. Certains font le guet aux entrées du passage, d'autres prennent des photos. Comme il est assez tôt, quelques personnes passent, cela rend O. assez nerveux. Nous devons donc partir sans que les Zwewla n'aient malheureusement eu le temps de graffer. Nous espérons y revenir plus tard dans la soirée.

Nous déambulons à nouveau dans les ruelles, à la recherche d'un lieu moins fréquenté. Nous nous arrêtons dans un autre passage. Mahn colle un carré d'affiches, et les Zwewla ont cette fois le temps d'apposer un pochoir. Le texte de ce pochoir est une phrase tirée d'un proverbe tunisien : "Personne n'est au dessus des lois, mais tout le monde est au dessus des pauvres." Pas de tag non plus cependant : un des gardiens de la médina nous interrompt. Il parle d'appeler les autres gardiens. O. décide de ne pas se rendre au premier endroit et d'en chercher un nouveau…

Nous errons longtemps comme des ombres dans la vieille ville, mais les endroits repérés sont surveillés. Nous décidons de nous arrêter... à regrets car certains pochoirs n'ont pas pu être tagués, et il reste 6 affiches. Nous sommes un peu frustrés, et fatigués des kilomètres parcourus, mais heureux de cette expérience commune. Nous décidons de laisser les affiches aux membres de Zwewla en remerciement de l'aide qu'ils nous on apportée : sans eux, notre aventure en Tunisie n'aurait pas eu le même impact, ni la même saveur. Et nous savons qu'il en feront bon usage.

EL Teneen Artiste de rue égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011. Ses travaux ont été décrits comme étant des symboles de la révolution égyptienne.

Anas A. Étudiant en télécommunication égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Anonyme Manifestant américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Stephane M. G. Espagnol, réalisateur documentariste et chroniqueur sur twitter du mouvement 15-M, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Marianna R. Manager en communication grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Sayda A. M. Mère de famille tunisienne. Son fils Hilme, ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011, a été tué par un sniper le jour du départ de ce dernier.


Ahmed A. Blogueur activiste et artiste égyptien, connu sous le nom de Psypherise, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Jon A. S. Espagnol, étudiant en architecture et porte parole du groupe Democracia Real Ya!, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Mahmoud S. Blogueur activiste égyptien, connu sous le nom de Sandmonkey, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Melanisia C. J. Citoyenne américaine, ayant participé à Occupy Oakland mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Ali M. Journaliste canadien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011. Il a perdu la vie dans un bombardement en Syrie en mars 2014.

Cartouche de balle utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.


Dalenda L. Tunisienne, historienne et ancienne directrice générale du Centre de recherche d’études, de documentation et d’information sur la femme (Credif), ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011.

Chelsea E. Photographe américaine, ayant participé à Occupy Wall Street, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier. La vidéo ou elle se fait asperger de gaz poivre par la police de New York le 24 septembre 2011 fit le tour de la toile.

Dax P. Père de famille américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Wael N. Ecrivain égyptien, co-fondateur de l'Association nationale de changement et du Parti de la Constitution, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Esraa A. F. Activiste internet égyptienne connue sous le nom de "Facebook Girl" ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Iphone cassé pendant les manifestations pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.


"Personne n'est au dessus des lois, tout le monde est au dessus des pauvres."








Interview à #Tunis du colectif d'artistes #Zwewla

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep mercredi 10 septembre 2014



Quelques jours après notre collage nocturne (lire ici), nous avons rendez-vous avec Zwewla pour parler de street art, d'avenir et de révolution.

Qui êtes vous ?

O. : "Nous sommes un collectif de jeunes, nous faisons du street art. Nous traitons des problèmes sociaux et économiques des Tunisiens. Nous voulons que les gens s'expriment à propos de leurs problèmes et de leurs droits. Nous sommes des jeunes filles et des jeunes garçons."

W. : "Nous parlons aussi des droits des pauvres, nous les incitons pour qu'ils fassent valoir leurs droits. Ici, les pauvres se sont habitués à leur situation, ils n'ont pas de droits sociaux ou de pouvoir politique. Nous incitons ces gens-là à bouger, nous essayons de faire changer les choses à travers des slogans et des messages."

O. : "Au début on était un groupe de 8 personnes. Zwewla est le résultat d'un processus. Nous venons de différents milieux. Nous prônons la tolérance, le respect des autres malgré leurs différences, sans être extrémistes dans nos idées. Nous avons fondé Zwewla pour militer, pour avoir une Tunisie meilleure, pour que les gens vive dignement et en particulier les gens marginalisés. Nous avons fondé le collectif lors d'une manifestation dans la rue pour les droits sociaux et économiques des travailleurs, organisée par le syndicat national des travailleurs tunisiens."

W. : "Nous avons choisi le graffiti parce que c'est le moyen le plus accessible à ces gens-là. Tous les gens passent devant les murs, c'est un contact direct. N'importe qui peut voir les messages et se demander ce qu'ils veulent dire. Pourquoi je n'agis pas ? Pourquoi je ne demande pas mes droits ? Le graffiti et le tag sont les premiers moyens d'expression de l'Histoire. À l'époque préhistorique, il y avait les tag dans les cavernes. L'homme préhistorique a commencé à s'exprimer à travers les murs."

Vous avez commencé quand ?

O. : "Cela fait 3 ans et demi. Après le soulèvement populaire du 14 janvier 2011. Les membres de Zwewla sont à la base des militants au sein de syndicats et de plusieurs associations. La cause nous a rassemblés pour fonder ce groupe. Quatre d'entre nous viennent du même quartier, puis nous avons fondé un noyau avec des amis. Par la suite, nous avons fondé d’autres sections dans le pays dont celle de Sidi Bouzid dont Khalil fait partie. "

K. : "A Sidi Bouzid, lors du soulèvement du 17 décembre, beaucoup de graffitis sont apparus. C’était les réactions spontanées de pleins de gens sur les murs de Sidi Bouzid. Il y avait des gens qui faisaient des pochoirs, d'autres des graffitis. Il y avait même des gens qui écrivaient avec des stylos. Après le soulèvement, ils ont repeint en blanc, malheureusement. Ils ont effacé la mémoire collective. "

W. : "C'était vraiment un patrimoine national. Ils y avait des gens de différentes régions de Tunisie et toutes sortes de messages : économiques, sociaux, politiques."

Comment ça s'est passé 2011 pour vous ?

W. : "Pour notre groupe, ce qui s'est passé en 2011, ce n'est pas vraiment une révolution. C'est peut-être le début d'un processus révolutionnaire, d’un mouvement social. Un parcours révolutionnaire, ça prend du temps, ça se travaille sur 10, 20 ans. C'est ce qu'on essaye de faire. Le 14 janvier, tout le monde était dans la rue, c'est la « révolution », tout le monde criait « dégage, dégage », et Ben Ali a dégagé. Mais ce n'est pas ça une révolution : c'est toute une mentalité à changer et c'est ce qu'on essaye de faire. Oui, on a assisté à la « révolution », et on y assiste toujours maintenant car c'est tout un parcours. "

Qu'est ce qui a changé ?

O. : "Nous avons plusieurs acquis, notamment la liberté d'expression."

K. : "Mais en fait, il y a toujours beaucoup de problèmes avec la liberté d'expression. Les rappeurs, les journalistes, tous ceux qui s'expriment, ont des procès."

W. : "C'est différent par rapport à avant. Avant, il n'y a avait même pas de procès. Les gens allaient directement en prison. Aujourd'hui, les gens s'expriment mais il y a beaucoup de procès. Il y a plus ou moins une liberté d'expression."

O. : "Oui, plus ou moins. Au niveau économique et social il n'y a pas eu vraiment d'évolution. Les gens les plus riches ont encore plus de pouvoir qu'avant. Le peuple attend toujours la justice sociale."

W. : "Changer les têtes n'a pas changé le système."

Comment vous voyez le futur ?

W. : "Il y a des élections en octobre. Nous allons voir qui va prendre le pouvoir. Mais les résultats sont presque acquis. Il a peu de partis qui ont suffisamment de moyens. Il y a déjà eu une élection en 2011, l’élection d’aujourd'hui se fera avec les mêmes mentalités, ça ne changera rien. A long terme il faut travailler sur les mentalités, dans tous les domaines, sinon on aura juste changé une façade, mais le noyau restera le même."

O. : "Aujourd'hui, les Tunisiens sont devenus de plus en plus passifs. Il y a des chances pour que l'ancien régime revienne en place de façon légale. C'est dû à l'absence d'une alternative à laquelle les gens peuvent adhérer."

Qu'allez-vous faire ?

W. : "On essaye de progresser, d'améliorer notre travail, d'améliorer nos slogans, de créer des sections dans toutes les régions de la Tunisie. La majorité des gens habitent dans les provinces de la Tunisie. Il faut atteindre ces gens là."

O. : "Nous avons toute une vision fondée sur la constitution d'un vrai mouvement underground, avec toutes formes d'expressions : le graffiti, le théâtre, la danse, le slam. Nous voulons que les gens puissent exprimer leurs problèmes. Nous voulons changer les mentalités passives en Tunisie."

K. : "Pour moi, l'idéal c'est d'avoir un mouvement, sans avoir un noyau. Il faut que chacun puisse s'exprimer à sa manière. Il ne faut pas hésiter, il faut agir. Comme nous, nous utilisons les murs pour nous exprimer. Il faut s'exprimer. Il faudrait des Zwewla dans toute la Tunisie sans forcément que l'on se connaisse et que l'on se voit. Il faut qu’il y ait une mentalité à la base de tout ça. C'est dur de travailler tout seul dans la durée."

Êtes-vous libre d'écrire ce que vous voulez sur les murs ?

W. : "Concernant le graffiti, c'est quelque chose de nouveau en Tunisie. Ce ne sont pas les espaces qui manquent.

Après, c'est comme partout, il a des lois : on ne peut pas écrire sur un mur privé. Les mouvements graffitis à la base sont des mouvements underground. Travailler librement, écrire ton message où tu veux se sera toujours interdit. Donc continuons comme ça, restons underground."

O. : "On pense aussi que le graffiti est un art rebelle, comme la révolution. Pour nous, il est normal que le système veuille essayer de nous arrêter. Mais inch'Allah nous n'arrêterons pas. Nous allons continuer notre travail, nous allons continuer notre militantisme. Ici en Tunisie et à travers nos discussions avec nos amis égyptiens, nos amis africains et nos amis français, pour collaborer ensemble et faire du bruit, ce qui peut casser le système."

W. : "Si on arrive à changer le 1%, je pense qu’on aura déjà réussi. La Tunisie est un cas particulier mais tu trouves les mêmes problèmes à travers le monde. À la base, le noyau du problème, c’est le système capitaliste."

Comment cela se passe dans les régions pauvres en Tunisie aujourd'hui ?

K. : "Le problème c'est que les gens ont beaucoup rêvé avec la révolution. Du coup, aujourd’hui, les gens sont désespérés, et méfiants. Les gens pensaient avoir une belle vie. Mais on ne peut pas tout changer en 10 jours. Il faut rester dans l'action, et ça prend du temps. Le système reste le même. Aujourd'hui, à Sidi Bouzid, tous les jeunes sont pro salafistes. Ce sont des extrémistes. Les jeunes fument du shit pour oublier."

On parle de terrorisme en Tunisie. De qui s'agit-il ?

W. : "Que ce soit nous ou le gouvernement, personne ne sait vraiment de qui il s’agit. Mais quand la jeunesse est désespérée, quand il y a de la pauvreté, il y a de l'extrémisme. Il y a eu 2 ou 3 meurtres de personnages politiques. Il y a eu des attentats dans le Djebel Chaambi [montagnes près de la frontière algérienne] qui ont fait beaucoup de morts."

O. : "Je pense que tous les responsables politiques participent à l'évolution du terrorisme en Tunisie. "

K. : "Les partis politiques et la presse pensent que le terrorisme est grave, mais il s’agit d’un phénomène social et politique plus grand. Le système a construit tout ça, il travaille avec ça, il gère ça."

W. : "Aujourd'hui pour combattre toute action terroriste, on cherche toujours sur le plan militaire ou sécuritaire. Votez pour nous, on vous protège. On ne cherche pas à combattre l'idéologie. Ça ne changera pas les vrais problèmes qui ont causé le terrorisme."






ATHÈNES

Arrivée à Athènes

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep jeudi 11 septembre 2014



Nouveau changement de décors. Nous voilà à Athènes, la dernière destination de ce projet (pour le moment :). La raison de notre venue ici ? En 2011, suite à la crise économique de 2008, les Indignés grecs se réunissent à Athènes et montent un campement sur la place Syntagma, devant le Parlement, pour exiger une « vraie démocratie » et un référendum contre les mesures d’austérité.



La ville est magnifique et l’atmosphère très douce. Nous sommes étonnés de découvrir tant de ruelles, de balcons, d’escaliers, de petites places, et une végétation omniprésente, dense et anarchique. Par contre, nous arrivons sans bagages : les valises se sont perdues lors du transit. Nous n’avons plus de batterie d'ordinateur, ce qui veut dire que nous ne pouvons donc plus accéder aux posts déjà rédigés, ni aux photos et surtout, nous n’avons pas d'affiches pour les collages...



Quoi qu’il en soit, Mahn décide de chercher des contacts sur place et écrit à Kostas Kallergis, journaliste freelance qui a réalisé un documentaire sur le street art engagé à Athènes en 2012. Il est intéressé par le projet et va nous aider trouver des endroits adéquats pour les collages. Il nous fera aussi mieux comprendre l’histoire d’Exarcheia, le quartier dans lequel nous collerons certaines affiches.

Exarcheia est un endroit particulier à Athènes. On considère ce quartier comme emblématique de la culture alternative de la ville. C’est à la fois un repère pour différents mouvements de gauche et d’extrême gauche, notamment anarchiste, et un lieu connu pour abriter un commerce de la drogue visible.



La police n’y est pas la bienvenue, et les autorités et les médias le décrivent souvent comme une zone de « non-droit ». Les murs sont recouverts de tags aux messages politiques contestataires, souvent anti-fasciste. Rappelons que suite à la crise et aux mesures d’austérité imposées à ce pays, le parti d’extrême droite, Aube Dorée, que l’on qualifie de néo-nazi, a réussi à s’imposer dans le jeu politique grec.

Kostas nous explique que le quartier est célèbre pour la révolte étudiante de l'université polytechnique de 1973. Elle avait été violemment réprimée par la dictature alors en place. C'est aussi là qu'ont démarré les émeutes de 2008 suite à la mort d'un adolescent de 15 ans, Alexandros Grigoropoulos, tué par balle par un agent de police. Kostas raconte que suite à la crise de 2008, beaucoup de banques furent saccagées et qu’il n’en reste qu’une seule dans le quartier.



Il nous dit aussi que dans la série de photos de Peter Hapak, il y a un chien, et s'étonne de son absence de la série de portraits de Mahn. Ce chien est devenu un symbole en Grèce lors des mouvements de protestations car il se trouvait être présent à toutes les manifestations. Il avait pour habitude de japper face aux rangs de policiers. Grâce au média, il avait gagné une certaine popularité et son nom était connu de tous : loukanikos, c’est-à-dire « Saucisse ». Kostas a écrit un post à propos de ce chien sur son blog. https://web.archive.org/web/20150815205425/http://whenthecrisishitthefan.com/2011/12/16/on-loukanikos-the-riot-dog/

Promis, Mahn l'ajoutera à sa série de posters :)

Vous pouvez voir le documentaire de Kostas sur quatre street artistes grecques en cliquant ici. https://vimeo.com/55286729









Entretien avec quatre " protesters " de la place Syntagma d'Athènes

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep samedi 13 septembre 2014



Nous voilà de depuis quelques jours à Athènes. En 2011, suite à la crise économique de 2008, les Indignés grecs se sont réunis et ont monté un campement sur la place Syntagma, devant le Parlement, pour exiger une « vraie démocratie » et un référendum contre les mesures d’austérité. Parmi eux, Marianna, Christina, Natalia & Antonis. Entretien.

Qui êtes-vous, que faites vous dans la vie ?

Marianna : Je suis actuellement sans emploi. Je suis en quelque sorte journaliste web.

Christina : Je suis sans emploi. Je travaillais dans la mode. Aujourd'hui je garde des enfants.

Natalia : Je travaille dans une banque au service communication. Avant je travaillais dans la pub.

Antonis : Je suis freelance dans la gestion de réseaux sociaux sur internet.

Avez-vous participé aux protestations de 2011 ?

Marianna : Pour moi, ça a commencé plus tôt, avec la mort de Alexandros Grigoropoulos [en 2008], un jeune de 16 ans tué par la police. Il y a eu beaucoup de manifestations. A cette époque j'étais en Angleterre, et quand je suis rentrée je me suis dit qu'il fallait faire changer les choses... c'était le début de la crise. Après les révoltes de 2008, tout est revenu à la normale. J'ai trouvé ça déprimant. Puis en 2011, j'ai vu un message sur Facebook invitant à se rassembler sur la place Syntagma. Je ne savais pas qui allait y participer, ni qui organisait. Mais c'était une bonne occasion pour moi pour descendre dans la rue, car il était clair que les choses n'allaient pas bien en Grèce. C'était différent de d'habitude. Il avait beaucoup de gens dans la rue. Il n'y avait pas de partis politiques, pas de drapeaux particuliers. Pour moi, ça a été aussi simple que ça. J'ai vu l'invitation sur Facebook et j'y suis allé.

Christina : Durant l'été 2007, il y a eu des incendies gigantesques en Grèce. Il y avait eu des protestations car il était évident que les incendies étaient dus à l'exploitation du territoire. Puis il y a eu le meurtre du jeune en 2008. Après j'ai travaillé dans une grosse société. Puis en 2011, j'ai entendu parler des Indignés, et quand j'ai vu les invitations sur internet j'y suis allé. Il y avait de nouveaux canaux de discussion, les gens voulaient changer des choses. Il y avait beaucoup de discussion à propos de l'économie. Nous étions peut-être 3000-4000 sur la place et les gens parlaient entre eux... Je me suis dit "oh mon dieux ça marche!", des choses vont pouvoir changer.



Natalia : J'ai l'habitude de manifester, j'ai grandi là dedans. J'étais au rassemblement de 2011. Car c'était un rassemblement et pas une manifestation. J'ai commencé à travailler dans une banque en 2008, quand la crise a commencé. J'ai vu les choses de près car je travaille dans les banlieues nords. La crise n'était pas encore vraiment là en 2008. Je ne savais encore ce que nous pouvions changer, ni comment. J'ai discuté avec des gens sur Twitter, j'y ai rencontré Antonis et j'ai commencé à entendre parler des Indignés. Trois jours avant la première grande manifestation nous nous sommes rassemblés sur la place Syntagma. Au début, nous étions une centaine. Il faisait très chaud et après quelques heures nous étions une quinzaine et beaucoup de policiers. Nous nous sommes dit que rien n'allait se passer et nous sommes rentrés chez nous. Quelques personnes étaient venues d'Espagne. Ils manifestaient devant l'ambassade espagnole. Les jours suivants, je les ai rejoints. Puis un deuxième appel a été publié sur internet. C'était celui du grand rassemblement de Syntagma. Et quand je suis arrivée sur la place, j'ai pleuré car je ne pensais pas qu'autant de gens viendraient. Les gens étaient prêts à se battre. Nous ne savions pas pourquoi nous étions là. Il y avait la question du mémorandum [accord signé avec le FMI imposant entre autre des mesures d'austérités en Grèce]. Et aussi, parce que les gens avaient de moins en moins de travail et de droits en général.

Antonis : A partir de début 2007, je me suis rendu compte que le système économique mondial était de plus en plus instable ; jusqu'à ce qu'arrive l'effondrement de la banque Lehman Brothers en 2008. Cela me faisait me dire que les choses n'allaient pas aussi bien qu'on le prétendait. J'ai commencé à observer la situation économique et politique en Grèce de plus près. Du coup en 2008, j'ai compris que les gens qui dirigent notre état ne servent que leurs intérêts. Nous vivons dans un système qui place l'argent au dessus des gens. Et on nous parle de justice sociale. J'ai compris que j'avais grandi dans un tas de mensonges. Du coup, en 2011 nous avions déjà accepté l'implication du FMI et de ses partenaires dans notre pays et tout le monde se demandait "que va-t-il se passer maintenant?" J'ai vu des gens discuter devant l'ambassade d'Espagne. Ils étaient une vingtaine. J'avais entendu parler des indignés en Espagne. J'ai été les rencontrer. C'était quelques jours avant le grand rassemblement. Ils agissaient, par exemple, en déambulant avec un cercueil représentant les funérailles de la démocratie. Je me suis dit, Pourquoi ne pas agir aussi ? Nous avons commencé à en parler sur Facebook et Twitter. Il y avait déjà des groupes de discussions. Nous avons fait un appel sur Facebook pour organiser un campement sur la place Syntagma. Nous avons rencontré d'autres gens... nous étions peut-être 300. Nous nous sommes demandé comment arriver à rassembler tout le monde. Nous avons donc créé une équipe d'organisation du site, une équipe communication etc... Deux jours plus tard, le grand appel sur Facebook était en ligne... La page avait plus de 100.000 likes. La chose qui m'a fait vouloir y participer, c'était la situation du pays. Montrer que nous étions là. Vous avez merdé, nous sommes là pour vous forcer à faire quelque chose. Pas pour donner une solution mais pour poser la question : que va-t-il se passer ?

Qui étaient les gens qui créaient les groupes sur Facebook?

Antonis : C'était des gens apolitiques. C'était spontané.

Marianna : Cela n'était pas important pour moi à ce moment-là. L'essentiel était que nous soyons-là.

Quelle a été la réaction du gouvernement ?

Christina : Je pense qu'il n'en avait pas grand chose à faire.

Natalia : Le gouvernement a changé plusieurs fois pendant cette période, du coup leurs réactions et celle de la police ont été différentes.

Marianna : Au début, c'était pacifique. La police était cool. Après le premier grand plan d'austérité, la police a été plus brutale. Nous avons été gazés jusqu'à plus soif. Plus de 3000 cartouches de gaz lacrymogène furent tirées en 48h. Les médias ont diffusé les images et les médias sociaux en ont diffusé d'autres. Le gouvernement n'avait jamais vu ça. A ce moment là, le premier ministre a même déclaré qu'il aurait aimé descendre sur la place et parler avec les gens, mais il pensait que les gens ne voudraient pas de sa présence. Et plus nous étions proches des élections, plus ils ont pris de distance avec nous. Ils ont fermé le métro sur la place. Ils voulaient vider les rues.

Après le 20 février, les réactions policières sont devenues extrêmes. Le gouvernement a prétendu que le parti fasciste s'était fait sa place dans le mouvement et s'exprimait avec nous. Ce n'était pas le cas.

Antonis : En fait, c'est l'inverse ! Je pense que le rassemblement a empêché que le parti se développe encore davantage.

Natalia : Les gens n'ont pas toujours de culture politique conséquente, certains ne savaient pas exactement pourquoi ils étaient là. J'ai rencontré un homme âgé qui était très énervé contre le gouvernement, mais il ne savait pas à qui s'adresser.

Antonis : Les gens voulaient qu'on les sauve. Ils venaient nous voir et nous demandaient ce que nous nous allions faire.

Christina : Pendant 20 ans, les gens se sont cachés derrière les grands partis. Ils se sentaient en sécurité.

Natalia : Les gens nous disaient qu'ils voulaient retourner en arrière et retrouver ce qu'ils avaient avant. Ils ne comprenaient pas que les choses avaient changés et qu'il allait falloir trouver de nouvelles solutions.

Marianna : Je pense que ce sont les gens qui sont partis de la place les premiers et se sont tournés vers les partis d'extrême droite.

Antonis : Les gens exprimaient leur colère envers un gouvernement qu'ils avaient choisi eux-mêmes.

Qu'est-ce qui a changé ?

Marianna : Les gens ont créé des « cliniques sociales ». Ici, nous sommes tous membres d'un groupe d'aide scolaire pour les gens qui n'ont pas les moyens de payer les cours privés permettant de rentrer à l'université. Nous avons créé un groupe de rencontre entre élèves et enseignants. Et beaucoup d'autres associations furent créées dans les domaines de l'art, la cuisine, le journalisme... C'est à ce moment que le Time magazine est venu à notre rencontre.



Antonis : La première chose est que les gens qui n'avaient pas les moyens d'accéder à certains services ont pu le faire grâce aux associations qui ont été créées : l'éducation, l'art, l'information, la justice... Ils ont trouvé de l'aide.

L'autre chose, c'est que auparavant la plupart des gens n'étaient pas impliqués, ils ont compris l'intérêt de se réunir et de faire les choses ensemble. Cela a été un grand changement pour beaucoup de gens et spécialement chez les plus jeunes. Cela a activé les choses et établit le fait que nous pouvions créer notre propre système. Tous ces efforts furent mal représentés par les médias. Ils ont parlé de philanthropie, mais ils n'ont pas parlé de solidarité ou d'aider les pauvres. Cela diluait l'essence de ce qui se passait vraiment.

Natalia : Dans le quartier où j'habite, le parti qui a été élu pour nous représenter faisait partie de l'assemblée de Syntagma. Les gens se sont impliqués en politique.

Christina : Les gens autour de moi, et moi-même, comprenons notre système de manière plus approfondie. J'ai l'impression d'avoir plus de pouvoir.

Qu'est-ce qui a changé au niveau politique ?

Marianna : Je pense que ce qui a le plus changé s'est passé au sein des gens qui ont participé au mouvement. Certains se sont impliqués politiquement par la suite. Mais je ne pense pas qu'il y ait eu de changement majeur dans la société. Nous avons prouvé que nous pouvions descendre dans la rue. Mais après trois ans, nous sommes les seuls à continuer. Les autres gens ne se rappellent plus de ce qui s'est passé en 2011.

Antonis : Les gens ne veulent pas se rappeler, car cela ne s'est pas terminé comme ils l'espéraient. Et les médias ont plus dénigré le mouvement qu'autre chose. Les gens disaient que le mouvement n'avait servi à rien, que cela avait bloqué la circulation, qu'il y avait eu des dégradations...

Natalia : Après les interventions policières, les gens ont eu peur, ils ne venaient plus.

Pourquoi pensez-vous que le gouvernement a réagi de cette manière ?

Marianna : Le gouvernement et l'élite ne voulaient pas donner d'importance au soulèvement populaire. Ils n'y avaient pas d'intérêt. Ils ne voulaient pas défier le FMI. Pourquoi laisser le peuple dicter la façon dont les choses allaient changer, alors qu'ils pouvaient garder cela entre leurs mains. Ils auraient perdu des électeurs.

Que va-t-il se passer demain ?

[Rire général]

Natalia : Beaucoup plus de flics! Je ne considère pas que le fait qu'il y ait de plus en plus de policiers soit un bon signe pour la démocratie.

Marianna : Les trois dernières années, il s'est passé beaucoup de choses. Il y a eu le meurtre du rappeur Pavlos Fyssas. Et des nouvelles lois pour encadrer les manifestations. On dirait que les rues se sont militarisées. Les flics sont habillés comme des militaires. Cela répand la peur. Ils ont fait des choses pour semer la peur dans la société et cela fonctionne. L'année dernière, ils ont attrapé quatre anarchistes qui avaient volé des armes. Le lendemain, ils ont publiés leur photos et ils avaient tellement été battus que leur visages étaient déformés. Ils les ont diffusées publiquement. Certains protestataires ont été torturés. La police nous fait passer le message qu'ils sont au sein du parti fasciste de l'Aube Dorée. Aux dernières élections, 90% du corps policier a voté pour ce parti d'extrême droite. Il y a des camps de concentration pour les immigrants à l'extérieur de la ville, loin de tout.

Ils ont rassemblé des consommateurs de drogue et des transsexuels et les ont envoyés dans ces camps pour une nuit et les ont ensuite libérés là-bas, au milieu de nulle part. Ils font des opérations comme ça pour faire peur aux gens.

Juste avant les élections de 2012, une semaine avant, le ministre de la santé Andreas Loverdos a déclenché une campagne contre des prostituées africaines en prétendant que ces filles contaminaient les familles grecques avec le sida. Pendant une semaine, nous avons pu voir les photos d'une vingtaine de filles qui étaient en fait grecques et uniquement consommatrices de drogues. Ils les ont rassemblées dans un garage et les ont forcées à faire des tests VIH. Leurs familles ont appris qu'elles étaient malades par les infos. Certaines ont été virées de leurs boulots et leurs enfants retirés de l'école. Cette situation était folle. La seule étrangère était une mineure sous le contrôle de trafiquants. Ils ont emmené les filles au Palais de justice en portant des masques et des gants, parce qu'elles avaient le sida, et cela face aux caméras. Ils les ont jugées et envoyées en prison pendant 8 mois. Plusieurs d'entre elles ont essayé de se suicider en se coupant les veines. Nous pensions que le ministre allait se faire mettre au placard à cause de ça, mais à la place, il a été promu Ministre de l'éducation !!!

Natalia : Des gens soutenaient ces agissements. Après la crise, la Grèce s'est divisée en deux. D'un côté, il y a des gens très conservateurs et religieux, et l'extrême droite qui comporte des néo nazis. Cela se retrouve dans toute l'Europe.

Quelle est la situation économique actuelle ?

Natalia : Les gens doivent se battre pour garder leur travail, même s'ils ne gagnent que 300-400 euros par mois. Quand tu as une famille et qu'il faut payer le loyer, la nourriture, les taxes, c'est une lourde charge. Cela garde les gens sous pression et ne les incite pas à protester. Ils n'ont pas le temps de s'intéresser à la politique. Nous sommes responsables par notre silence, mais nous ne sommes pas autant responsables que les politiciens qui ont caché la vérité sur notre situation économique.

Marianna : Les médias disent que les choses s'améliorent, que les touristes reviennent. Ils parlent de lumière au fond du tunnel. Ce que je vois, c'est que les gens sont étranglés par leurs problèmes économiques, ils finissent par se résigner et accepter leur situation. Ils sont fatigués. On nous dit que nous sommes feignants et que les autres pays doivent payer pour nous ! Merde !

Un brin d'espoir pour le futur ?

[Rire général]

Antonis : Le truc, c'est que si on prend de la distance et que l'on regarde l'histoire on se rend compte que les choses se répètent. Nous allons peut-être toucher le fond. Nous ne savons pas où est le fond. Peut-être y aura-t-il une guerre ? On ne sait pas. Mais à un moment, le cercle s'arrêtera et toute la question est de savoir comment on changera la structure de notre système économique et politique, afin de ne pas toucher le fond à nouveau. Nous pouvons construire quelque chose de plus stable.



Qui peut faire ça ?

Antonis : Pas une personne seule !

Natalia : Moi je pense que c'est compliqué car nous vivons dans un système capitaliste complexe. Je ne vois pas comment les choses peuvent changer aujourd'hui. Nous vivons dans une société de consommation. L'argent est un motif très puissant pour ne pas changer les choses.

Christina : Nous-mêmes, nous faisons évoluer les choses, dans les choix que nous faisons personnellement. Mais d'une manière générale, je ne suis pas très positive.

Antonis : Je pense que tout est une question d'équilibre. Nous n'allons pas changer le système économique. Il ne faut pas rêver de choses qui ne se feront pas. La question est de savoir comment nous pouvons faire évoluer ce système pour l'adapter à nos besoins. C'est aussi simple que ça. J'ai des amis qui se sont impliqués contre la privatisation de l'eau, ils ont fait du lobbying pendant trois ans et ils ont réussi à faire évoluer les décisions qui se mettaient en place. Nous pouvons agir sur les nœuds du système. Il est possible de faire pression sur ces nœuds pour faire évoluer notre système.



Collage à Athènes

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep mardi 16 septembre 2014

Katerina P. Femme d'affaire grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008. Katerina P. Femme d'affaire grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008. Photo Yuvany Gnep.


Après avoir racheté une batterie d'ordi, fait réimprimer les posters grecs et racheté le matériel pour coller, nous sommes enfin prêts pour le dernier collage ! Le journaliste Kostas Kallergi nous accompagne pour écrire un article sur le projet.

Son papier sera publié dans Vice, un magazine d'origine américaine qui fait référence en matière de cultures alternatives. Mahn est super fier de voir le projet y figurer ! L’article est consultable sur le site de Vice Grèce (donc uniquement en grec) en cliquant ici.

Nous commençons par coller dans le quartier Exarcheia. Le premier mur se situe dans une rue passante, prêt de la petite place centrale.

Nous nous dirigeons ensuite prêt du lieu où ont eu lieu les émeutes de 2008. Ces dernières avaient été provoquées par la mort d'un adolescent de 15 ans, Alexandros Grigoropoulos, tué par balle par un agent de police.

Toujours dans Exarcheia, nous partons ensuite vers le parc Navarinou, créé à l’initiative d’habitants du quartier et autogéré. Ancien parking à l'abandon, le lieu était destiné à être vendu à des promoteurs. Cela n'étant pas du goût des habitants, qui ont décidé de transformer l’endroit en parc par leurs propres moyens.

Nous continuons vers un autre lieu représentatif d’Exarcheia : l’école polytechnique, haut symbole de la résistance en Grèce en raison du soulèvement des étudiants de 1973. Mahn colle ses affiches sur les colonnes du portail de l’université, qui avait été enfoncé par les chars de la dictature alors en place.

Nous finissons cette journée de collage par la place Syntagma, devant le parlement, à l’endroit même où ont eu lieu les plus importants rassemblements de 2011. Comme à notre habitude pour ce type d’endroit quadrillé par les policiers, nous faisons vite. Mahn part le premier et colle rapidement ses deux affiches, tandis que Yuvany, et Kostas pour cette fois-ci, suivent de loin et jouent les touristes prenant des photos. Kostas nous racontera par la suite qu’en nous accompagnant sur ce lieu chargé de sens, il a revécu les évènements d’alors : le nombre incroyable de personnes rassemblées, l’ambiance solidaire et contestataire, l’espoir dans les yeux des gens…

C'était le dernier collage, il ne reste plus qu'une interview. Vous pourrez ensuite suivre le projet sur http://www.facebook.com/mahnkloix

Photos : Yuvany Gnep

Marianna R. Manager en communication grecque, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Sadi T. Civil égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Sayda A. M. Mère de famille tunisienne. Son fils Hilme, ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011, a été tué par un sniper le jour du départ de ce dernier.

Aldo Civil ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Dax P. Père de famille américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Ahmed H. Dentiste égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe. Il a perdu la vue après avoir reçu des balles en caoutchouc dans les yeux en janvier et novembre 2011.

Saleh M. Civil égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Joanne S. Activiste américaine, s'étant présentée aux élections pour représenter le 53e district de l'assemblée du Wisconsin. A écrit son manifeste et l'a porté accroché sur son dos lors de manifestations devant le Capitole en 2011.

Ydanis R. Conseiller municipal de la ville de New York, ayant participé à Occupy Wall Street, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.

Esraa A. F. Activiste internet égyptienne connue sous le nom de "Facebook Girl" ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Emil S. Citoyen égyptien, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011, il porte un panneau sur lequel est écrit "Le peuple veut le départ du Field Marshal", le commandant en chef des forces armées égyptiennes.

Jon A. S. Espagnol, étudiant en architecture et porte parole du groupe Democracia Real Ya!, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.


Ali M. Journaliste canadien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011. Il a perdu la vie dans un bombardement en Syrie en mars 2014.

Christina L. Grecque, chef de produit dans la mode, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Hamada B. A. Chanteur tunisien ayant lutté pour le départ du dictateur Ben Ali lors du printemps arabe en 2011. Sa chanson "Rais Lebled", sortie en november 2010, a été décrite par le magazine Time comme étant "l'hymne de la Révolution de jasmin".

EL Teneen Artiste de rue égyptien ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011. Ses travaux ont été décrits comme étant des symboles de la révolution égyptienne.

Cartouche de balle utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Andre L. Artiste américain, ayant participé à Occupy Oakland, mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.


Molly K. Américaine diplômée en art et histoire de l’architecture. Elle a lancé la pétition "Dites non aux frais de carte de crédit chez Bank of America" qui a fait plier la banque en question.

George A. Docteur en sociologie et DJ grec ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Um T. Civile égyptienne ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Ricardo G. Espagnol, ingénieur industriel et membre du groupe de travail de Economía de Sol, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.


Olmo G. Espagnol, responsable des réseaux sociaux du groupe Democracia Real Ya!, ayant participé au mouvement des indignés Plaza del Sol en 2011, contre l'oligarchie des systèmes politiques et les abus des systèmes économiques et financiers.

Pavlos P. Père de famille grec, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.

Mahmoud S. Blogueur activiste égyptien, connu sous le nom de Sandmonkey, ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Molehe K. Citoyen américain, ayant participé à Occupy Oakland mouvement de contestation pacifique dénonçant les abus du capitalisme financier en 2011.


Yahi A. S. Médecin égyptien travaillant à la clinique mobile de la place Tahrir, luttant pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.

Cartouche de gaz utilisée contre les manifestants ayant lutté pour le départ du président Moubarak lors du printemps arabe en 2011.


Natalia K. & Antonis Couple grec, ayant participé au mouvement des indignés en 2011, contre l'austérité à laquelle la Grèce fait face suite à la crise économique de 2008.




En Grèce, " la classe moyenne est détruite "

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep samedi 20 septembre 2014

Pavlos Papanotis et sa fille Agathis.


Interview de Agathi et Pavlos Papanotis, deux protesters de la place Syntagma à Athènes. Trois ans après le mouvement, une certaine résignation flotte dans leurs propos.

Qui êtes vous ?

Pavlos : Mon nom est Pavlos Papanotis, je suis professeur à la retraite.
Agathi : Je suis Agathis, la fille de Pavlos, je suis archéologue.

Pourquoi avez vous participé aux événements de 2011 ?

Pavlos : En 2011, nous traversions une crise économique et on pouvait voir comment la situation du pays allait se dégrader dans le futur. Le pays a perdu sa capacité à se suffire à lui-même. Ce pays a connu beaucoup de crises économiques. Il s'était déjà passé la même chose en 1998 : l'économie s'était effondrée. L'histoire se répétait. Il y avait 2 partis principaux en Grèce en 2010. Comment penser que les partis qui nous avaient plongés dans la crise allaient nous en sortir ? La situation était bouillante.

Agathi : Je voyais beaucoup de mes amis perdre leur emploi. Je voyais aussi la montée du fascisme en Grèce. C'était une conséquence directe de cette crise économique. Je voyais mon père être triste en voyant que ces enfants n'avaient pas de futur. Il se sentait responsable de ça. Et puis c'était la seule chose à faire, je ne pouvais juste pas rester à la maison. C'est de la responsabilité des gens de se battre contre ce type d'oppression. Il y avait déjà eu des manifestations quand nous avons commencé à participer.

Nous avons entendu parler de la Plaza del Sol en Espagne. Des gens faire des blagues, ils disaient : « Chut, les Grecs sont en train de dormir ». C'était la pire chose à faire, de provoquer les Grecs comme ça [rires]. Il y a eu beaucoup de rassemblements devant l'ambassade espagnole puis les gens se sont rassemblés place Syntagma. Puis il y a eu des manifestations toutes les semaines.



Combien de temps êtes vous restés ?

Agathi : Jusqu'à ce qu'ils détruisent le camp, au bout de deux mois. Ensuite, il y avait toujours des manifestations, mais la police est devenue brutale avec les manifestants.

Pourquoi pensez-vous que les gens sont descendus dans la rue ?

Agathi : Les gens étaient très déçus par les partis politiques en place. Mais il n'y avait pas que des personnes votant à gauche. Il y avait l'extrême droite, la montée du fascisme. Pour les personnes de mon âge, nous étions intéressés par le mouvement Occupy, par les assemblées où tout le monde pouvait s'exprimer. C'était la première fois que quelque chose comme cela se passait en Grèce. C'était la première fois que j'entendais des gens, comme mon père, qui prenaient le micro, et demandaient pardon pour les choix politiques qu'ils avaient fait dans le passé.

Pavlos : Les Grecs ont été très surpris par la crise économique. En 2010 les gens pensaient que tout allait bien. Il y avait eu les Jeux Olympiques en 2004, nous étions le centre du monde. Les politiques nous disaient que nous étions le 24ème pays le plus riche du monde. Et les gens le croyaient. Puis un jour on nous a dit qu'il n'y avait plus d'argent, que c'était la faillite, que nous allions être sous tutelle du FMI.

Qui a causé cette faillite ?

Agathi : Nous avons dépensé de l'argent que nous n'avions pas. Nous avons dépensé trop d'argent pour les Jeux Olympiques. On a aussi caché la réalité économique pour rester dans les critères économiques de l'Europe. C'est la raison principale pour laquelle cela est arrivé du jour au lendemain.

Pavlos : Être membre de l'Union Européenne fut très mauvais pour l'économie grecque. Notre système n'est autonome. Avec les accords sur l'agriculture par exemple, nous ne pouvons plus produire ce dont nous avons besoin. C'est de pire en pire. J'ai l'impression que la faillite a été orchestrée par l'Union Européenne. Et nos politiciens ont été mauvais. Une commission a été chargée par le parlement de déterminer les raisons de cette crise, mais c'était une blague, car ils n'ont jamais expliqué les causes.

Quel a été l'impact des protestations ?

Pavlos : En 2011, les gens pensaient qu'ils avaient du pouvoir. Mais face à la brutalité dont a fait preuve le gouvernement contre les manifestants, et en raison de la pauvreté, les gens se replis sur eux-mêmes.

Agathi : Je ne suis pas d'accord. Je parle au nom des gens qui sont restés dans la rue. Nous sommes moins passifs. Nous avons créé des contacts entre nous et commencé à travailler ensemble. Il y a aujourd'hui beaucoup d'associations autogérées dans le domaine de la santé et de l'éducation. Les gens s'organisent localement.

Pavlos : Les médias veulent aujourd'hui nous faire croire que le gouvernement réussit, que nous allons retrouver notre place sur le marché sous peu, dans le secteur du tourisme notamment. Mais même si le tourisme va mieux, un pays qui n'a pas de secteur de services et de secteur industriel ne peut pas fonctionner.

Qu'est-ce que cela a changé au niveau du gouvernement ?

Agathi : Ce que ça a changé ? Le gouvernement a appris à mieux gérer ce genre de manifestation. Aujourd'hui, ils savent comment vider une place en 5 minutes de dix manières différentes. A l'époque, c'était fou ! La police nous gazait de manière disproportionnée. Le gouvernement avait vidé ses stocks de gaz tellement ils nous gazaient, il a du importer depuis Israël.

Pavlos : Ma femme a été projetée sur le sol et moi bousculé juste parce que j'étais dans la rue. Nous ne faisions rien, nous étions juste dans la rue. Nous avons demandé les numéros de matricule du policier et il nous a menacés de nous arrêter. Heureusement, il y a avait un caméraman canadien et ils n'ont pas continué car ils étaient filmés.

Mise à part une meilleure organisation policière, y a-t-il eu d'autres changements ?

Agathi : Il y a eu des nouvelles lois sécuritaires, comme l'interdiction de porter une capuche ou un masque à gaz.

Pavlos : Dans notre constitution, nous avons le droit de nous rassembler. Ces dernières années, ce droit a été bafoué à de multiples reprises.

Qu'est ce que le gouvernement a fait de positif pour les gens ?

Agathi : Le chômage a explosé. Ils réduisent les droits sociaux tous les 2 mois.

Pavlos : Aujourd'hui, dès que nos politiques veulent changer quelque chose en Grèce, ils doivent aller à Paris et demander la permission à la « Troïka », c'est-à-dire l'Union Européenne. Où est notre indépendance ? Il y a de nouvelles taxes tous les jours. C'est déprimant. Les gens ne peuvent plus payer. Les magasins ferment leurs portes. Les gens perdent leur travail. La sécurité sociale n'est plus qu'une blague. Si on n'a pas d'argent, on ne peut plus se soigner. Il y a de plus en plus de clochards, il est courant de voir les gens fouiller dans les poubelles. Il a eu plus de 5000 suicides suite à des dépressions en raison de la situation économique. On a arrêté de les compter. La classe moyenne est détruite. Comment voulez vous relancer l'économie dans de telles circonstances? Les gens pauvres n'ont plus de futur.

Que pensez vous qu'il va se passer maintenant ?

Pavlos : Les nationalistes et les fascistes auront de plus en plus de pouvoir. Après la crise de 1933, le fascisme s'est répandu dans toute l'Europe et Hitler a été élu démocratiquement. En Grèce, le général Metaxás qui était fasciste est arrivé au pouvoir. Au Portugal, ce fut Salazar et en Espagne, Franco. En Grèce, en 2010, le parti fasciste et néo-nazi Aube dorée avait seulement 0,5% des voix, aujourd'hui ils sont entrés au parlement. Ils ont des voix dans les endroits où il y a beaucoup de chômage. C'est comme en France avec Le Pen. Les gens de ce genre de parti profitent du malheur des gens.

Agathi : Certaines sociétés veulent exploiter les terres grecques depuis longtemps. Les négociations à ce sujet ont repris : il est question de zones économiques spéciales pour des sociétés étrangères. Par exemple, une société canadienne veut exploiter des mines d'or dans le nord. Pour cela, certains villages doivent être détruits, il y aura des conséquences graves sur l'environnement. Les gens qui habitent là-bas ont protesté, et ont été brutalisés. La police s'est introduite chez les habitants sous prétexte de terrorisme, ils ont même tiré du gaz lacrymogène dans des écoles. Vous nous demandiez ce qui a changé : le gouvernement sait désormais comment nous faire taire.

Avez-vous un peu d'espoir ?

Agathi : Nous ne pouvons rien attendre de nos hommes politiques. Nos derniers espoirs on disparu. Nous avons vu tellement de gens protester et cela n'a rien changé. C'est désespérant.

Pavlos : Aujourd'hui nous avons tellement de problèmes que les gens essayent juste de survivre.

Ces mouvements de protestations ont-ils tout de même servi à quelque chose ?

Agathi : Ils auraient pu.

Pavlos : Nos marges de manœuvre sont très réduites car nous avons beaucoup de dettes. Même si la gauche venait au pouvoir, cela ne changerait rien. Nous n'avons plus d'argent.

Agathi : Avant, on posait la question « Où travailles-tu? » puis c'était « Travailles-tu? », et aujourd'hui c'est « Es-tu payé? » [rire]
Ma mère dit que la seule chose qui servirait serait de prendre les armes, que le sang coule. Elle veut faire la révolution. J'ai toujours dit que c'était la plus radicale de nous trois !



Fin du voyage

Écrit par Mahn Kloix & Yuvany Gnep vendredi 26 septembre 2014

Ça y est ! Le voyage est terminé. Nous sommes rentrés à Marseille. Pas évident de faire une synthèse de tout ce que nous avons vécu. En tout, 150 affiches furent collées. Nous avons parcouru plus de 200 kilomètres à pied, réalisé 8 interviews et fait des dizaines de rencontres… De Manhattan aux quartiers populaires noirs américains de Oakland, en passant par la médina de Tunis et les centres villes d'Athènes et Madrid, nous sous sommes retrouvés dans des réalités sociales et politiques contrastées. Les personnes dont nous avons croisé la route portent des regards différents sur les conséquences de la crise et des évènements de 2011.

Certaines choses se retrouvent toutefois dans les paroles de beaucoup d'entre eux. La plupart nous ont parlé d’un système économique malade, de l’injustice sociale qui s’aggrave, de la frilosité des politiques et des réponses policières de plus en plus violentes. Tunisiens et Grecs s’inquiètent de la montée de l'extrême droite et des extrémistes. Partout, un fort sentiment de déception, des rêves de changement qui n’ont pas abouti, des mentalités et un système qui évolue peu, ou pas dans le bon sens.

Face à ces regards presqu’unanimement amers, nous avons aussi relevé des lueurs d’espoir et chez certains, une détermination à ne jamais se laisser faire. La plupart des personnes rencontrées reconnaissent avoir été marquées par les évènements de 2011; les protestations auxquelles elles ont pris part ont déclenché chez elles et dans leur entourage des prises de conscience politiques. Ils ont par exemple constaté comment les responsabilités des systèmes économiques et financiers sont désormais mieux identifiées et désignées. Ils ont vu autour d’eux naître de nouvelles connexions et débats entre les gens. La question de la solidarité a été revisitée, à travers des initiatives citoyennes par exemple, comme en témoignent les messages disséminés par le collectif tunisien Zwewla ou par de nombreux activistes sur le terrain, et sur internet.

Tous reconnaissent que changer un système, c'est aussi changer des mentalités et cela peut prendre des décennies. Avec eux, nous espérons que la somme des volontés individuelles et des initiatives collectives permettra de faire évoluer les choses, petit à petit. Small is big!



Mot de la fin

Et voici le temps des remerciements car si ce projet a pu voir le jour c'est grâce à l'aide de beaucoup d'entre vous.

Je tiens tout d'abord et tout particulièrement à remercier Yuv pour son soutient, son calme et sa patiente, les recherches d'informations sur internet, les traductions et corrections d'emails, les kilomètres parcourus dans les airs et les rues, le repérage des murs, la surveillance des environs, les prises de photos, de vidéos, la préparation et réalisation des interviews, la relecture des interviews, les recherches sociologiques finement menées sur les différents endroits dans lesquels nous avons collés, l'aide dans le choix des photos à diffuser, la rédaction et la correction des posts pour la marseillaise, sa joie et sa bonne humeur… Et j'en oublie certainement… Sans toi je n'aurais jamais pu faire tout ça.

Merci à tous ceux qui ont participé sur Kisskissbankbank, Gwen et Marion, Daniel et Chantal, Medora, Mia, Kiki, Daoud, Joce, Liliane, Dave, July, Elodie, Eric et Céline, Sandy, Maud, Paul et Pascale, Caro, Greg, Babouch, Florence, Guillaume, Aurélie, Mimi, Vince et Sylvie, Raphaï, Marguerite, Mado et François, Pauline, Jessy, Julie, Antoine, Wahib, Laetitia, Yonyon et Benjo, Sam, Julien, Prune et Cam, Aurélien et Carole, Claire et Patrice, Domi, Brigitte, Jean-Michel et Corinne, Elise, Stéph et Franc, Fabio, Annouk, Khem, Toune, Nelly et Gérard, Marie et Bebert, Yannick, Sovann et Gé, Math et Émilie et enfin Donald.

Merci à Annouk, Aline et Marie-Hélène pour les conseils et les contacts.
Merci à l'équipe de la Marseillaise (Paul, Marie-Laure, et Sebastien) qui a cru en ce projet et l'a diffusé sur son blog pendant tout l'été.
Merci à Sophie pour le contact avec France 3 et Fabian pour celui du Journal de Saône et Loire.
Merci à Julien pour les contacts à Tunis.
Merci à Sebastian pour les traductions en espagnol, à Abir pour les traductions en arabe, à Christina pour les traductions en grecque et à Kevin pour la relecture de l'anglais.
Merci à David Maginot pour les conseils vidéos.

Et merci à tous ceux que j'ai oublié de citer.

À bientôt

Mahn